Je dédie ces lignes à ma belle amoureuse qui illumine ma vie. Je t'aime et je suis avec toi...
Cela fait un peu plus de huit ans que nous sommes ensemble. Je l'aime et elle m'aime mais je doit composer avec une autre. Qui est l'autre? Sa maîtresse. Non, ce n'est pas une femme mais elle lui prend tout son temps. Je vis au rythme imposé par sa maîtresse qui l'emmène toujours loin de moi pour des périodes plus ou moins longues, dans des endroits qui peuvent être en France comme à l'étranger.
On l'appelle la Grande Muette, moi, je lui donne comme surnom " Maîtresse ". Je vis au rythme des gardes, des sorties terrains, des interminables cérémonies et défilés et des opérations extérieures. Cela fait plus de sept ans que ça dure. Sept ans ou on se voit quasiment en coup de vent…
Elle part et elle revient. Elle part avec des photos et elle revient avec des souvenirs… A chaque retour, elle me décrit les paysages et me fait voir des photos. Toujours la population locale, jamais de photos d'elle. Sur ce qu'elle fait là bas, elle reste très discrète. Même dans ses lettres, elle me décrit les ambiances des lieux qu'elle fréquente mais pas plus.
Elle part, elle revient, m'assure que c'est la dernière fois qu'elle part, promet de passer plus de temps avec moi, avec nous mais la maîtresse s'en mêle et contrecarre tous nos projets.
Sa maîtresse lui a appris à être discrète sur sa vie privée et à paraître dure et inflexible. Elle en souffre. Elle aimerait bien pouvoir dire " voici ma compagne " lors des cérémonies qu'elle fait mais ce n'est pas possible. " Don't ask, don't tell " est la devise de sa maîtresse…
Elle est partie pour un autre pays, pour faire son job et elle va revenir, avec son habituel sourire mais son regard ne sera déjà plus le même.
Elle est revenue. Je n'ai rien entendu, je savais juste qu'elle allait rentrer dans la semaine au lieu de la date de retour initialement prévue. Elle sent le soleil, la sueur et le manque de sommeil. Elle s'excuse de ne pas me prendre dans ses bras car elle désire prendre une douche d'abord. Je la laisse faire et elle revient quelques minutes après. Je sens deux bras m'attirer contre son corps. Sa tête est posée contre mon épaule droite et je sens qu'elle pleure. Elle pleure de joie et de tristesse. Les mots sont bloqués au fond de ma gorge, je ne sais pas quoi faire devant sa douleur alors je la serre dans mes bras. Elle qui, d'habitude, ne montre rien, se laisse aller dans mes bras. Pour la deuxième fois, depuis que nous sommes ensemble, je la voit pleurer. Je suis émue et j'essaie de la réconforter du mieux que je peux.
Sans rien dire, nous allons dans notre chambre et là, allongées dans notre grand lit, à l'abri dans mes bras, elle me parle, évoque certains souvenirs que je ne connaissais pas et elle fini par s'endormir dans mes bras. Moi, je passe une nuit blanche, partagée entre l'envie que j'ai d'elle et le désir de la laisser dormir.
Les premiers rayons de soleil entrent timidement dans la chambre. Elle est allongée sur le ventre, visage tourné vers le mur et je sais qu'elle ne dort pas. Allongée sur le côté, je l'observe. Ma main est posée sur le bas de son dos et je devine, au toucher de mes doigts, qu'elle a de nouvelles cicatrices sur le dos. Je sais d'avance qu'elle ne me répondra pas maintenant sur l'origine de ses blessures. Je me colle contre elle, m'enivrant de sa chaleur et de son parfum. Ça m'a tellement manqué… Brusquement, elle est au dessus de moi, son regard planté dans le mien, un léger sourire sur les lèvres. Elle me regarde un long moment et nous nous embrassons avant de faire l'amour. Je redécouvre son corps et, lentement, nous faisons l'amour comme si c'était la première fois… Son corps est toujours aussi musclé mais je sens qu'elle a maigri. Je réapprends les contours de son corps, m'enivre de son odeur, de son goût. Elle se donne à moi et je me donne à elle. Elle se donne à moi avec sa générosité habituelle et je la retrouve telle que je la connait: fougueuse, inventive, prévenante. Elle me fait l'amour comme si elle voulait effacer les semaines qui nous ont séparées et je peux lire dans son regard tout l'amour qu'elle a pour moi…
Son portable sonne et elle décroche. Pas besoin qu'elle me dise qui c'est… C'est sa Maîtresse. Sa Maîtresse qui lui dit de venir à huit heures tapantes. Ma compagne a le visage fermé quand elle raccroche, se lève avec un sourire d'excuse, m'embrasse et s'en va.
Elle revient et me trouve dans le salon, avec une tasse de café, me dit qu'elle est en permission jusqu'à début janvier mais qu'après, elle doit repartir. Sa Maîtresse nous laisse du temps mais c'est pour mieux nous séparer car, dès son retour, elle partira encore pour faire ce qu'elle est formée à faire.
Elle part, elle revient, elle partira et elle reviendra et je devrai composer avec ce rythme infernal imposé par sa Maîtresse mais il y a une seule chose qu'Elle ne peut pas nous prendre: le temps que nous passons ensemble.