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 The Imaginary Games - HannahP22

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HannahP22 ThiaudièreSarah




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A écrit : Thérapie Mortelle, Ya Soshla S Uma, The Imaginary Games
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MessageSujet: The Imaginary Games - HannahP22   The Imaginary Games - HannahP22 Icon_minitimeDim 9 Aoû 2015 - 12:36

Pseudo de l'auteur : HannahP22

Nombre de chapitres : 5 ?

Dans le cas d'une fanfiction, le nom du couple principal :

Rating de l'histoire : G
Genre de l'histoire : Romance, Aventure, Fantastique

Résumé de l'histoire :

Une idée provenant de Hunger Games.

Terminée et Corrigée



********************************************************************

« Mes amis, l’heure est au sang et aux larmes. La guerre se fait de plus en plus pressante et la mort nous appelle d’une manière plus noire encore qu’une nuit sans lune. L’humanité est en train de périr sous les coups injustes d’une indécision politique ininterrompue. Nous autres, politiciens du monde, nous prenons en considération vos ressentiments et vos plaintes languissantes. Le sang coulant de votre bouche, entrouverte par la fatigue et la souffrance, sera bientôt transformé en une eau cristalline d’une pureté sans nom. Peuples désenchantés, la solution vient en ce jour d’être trouvée ! Le différent qui nous déchire va se régler dans un nombre de victimes limité : chaque pays choisira un homme ou une femme, et chacun de ces représentants s’affronteront lors d’une série d’épreuves dans une arène dite spéciale. Le pays gagnant aura alors le droit d’imposer la direction économique, politique mais aussi sociale dans laquelle notre monde se dirigera. A l’heure actuelle, 80 pays ont accepté cette proposition. Ne craignez plus rien et restez devant votre télé. Supportez-votre pays !»
Lena éteignit la télé et laissa tomber son corps mollement dans le canapé en cuir. « Cela finira mal » songea t-elle. « Cela finira en terrible dictature, et les morts seront plus élevés encore que si nous avions tout simplement troué nos corps de balles ». Elle ferma les yeux ; elle était fatiguée. Epuisée de toute cette agitation politique qui ne faisait qu’ébranler le sang des garçons friands d’action, et l’imagination peureuse des jeunes filles craignant le changement de leur vie sans désagréments. Elle ne parvenait pas à saisir comment le monde avait pu en arriver là. Si la guerre se changeait en un vulgaire jeu télévisuel, quelle serait la différence entre le Bien et le Mal ? Résiderait-il encore dans ce monde une once d’humanité ? Comme à son habitude, Lena laissa cette dernière question sans réponse, refusant d’y réfléchir trop longtemps afin de ne pas se retrouver face à une insupportable vérité. Elle se leva et regarda par la fenêtre : sans surprise, il neigeait. Elle l’ouvrit alors et tendit délicatement la main. De son autre main valide, elle prit sa tasse de thé et la porta délicatement à sa bouche. Une large coulée de liquide chaud vint brûler agréablement le long de sa gorge jusqu’à son ventre tandis que le froid lui gelait la main. Voilà exactement l’expression physique de celle qu’elle ressentait actuellement. Froid, chaud, tout cela se ressemblait au final. Peut-être même était-ce l’attraction des deux qui nous donnait l’impression d’exister ? Elle esquissa un vague sourire à cette pensée et referma la fenêtre d’un geste sec. Elle but une autre gorgée de thé mais il lui sembla cette fois-ci, pour une raison inconnue, terriblement amer. C’était si pathétique de vivre… Elle  décida alors d’aller faire un tour. Elle enfila plusieurs couches de vêtements car l’hiver en Pologne était rude et qu’elle n’aurait pu en aucun cas faire un mètre en t-shirt sans geler sur place. Mais le froid n’était pas ce qu’elle redoutait le plus, elle craignait davantage les malfrats rôdant dans son quartier. Plus les vêtements étaient multiples et épais, moins la lame d’un couteau trouverait le chemin jusqu’à sa chair. Cela constituait une maigre protection mais c’était mieux que rien. Malheureusement le port d’arme était interdit dans son pays. C’est pourquoi elle ne comptait que sur sa chance et sur ses quelques connaissances d’autodéfense. Une fois préparée, elle se dirigea discrètement jusqu’à la porte d’entrée.
- Où vas-tu ? Il est 5h00 du matin.

La jolie rousse se retourna vivement et découvrit Julien, son amoureux, appuyé contre le mur, les bras croisés. Il avait adopté un air sévère et ses traits étaient tendus grisés par l’inquiétude, bien qu’il ne fut en réalité nullement soucieux. Ce n’était pas la première fois que Lena partait en pleine nuit mais il n’aimait guère cela. Chaque soir la même scène se répétait : il la questionnait, elle éludait et partait après lui avoir donner un court baiser. Seulement cette fois, Julien comptait bien ne pas la laisser filer.
- Je n’arrive pas à dormir, répondit-elle en prenant soin d’éviter son regard.

Il sembla se radoucir et vint l’entourer de ses bras chauds et musclés :

- Mlle Katina que vous ai-je dit à propos de vos sorties nocturnes ?
- Je sais c’est dangereux mais j’en ai besoin, s’écria-t-elle violemment en se détachant de lui. Quand vas-tu comprendre ça ?

Elle le fixa un instant ; ses yeux brillaient étrangement. Elle s’en voulait d’avoir crié, il le savait. Jamais elle n’avait haussé le ton auparavant. Que lui arrivait-il ? Ce n’était pas normal. Sa gorge la piquait atrocement et ses membres tremblaient à s’en rompre les os. A ce stade, il était indiscutable que la fièvre s’emparerait bientôt de son corps pour le réduire en une chair usée et inutile. Dans peu de temps, elle se viderait de ses ressources et ne serait même plus en état d’effectuer le plus faible mouvement de main. Elle se retrouverait paralysée par la peur, terrassée par une simple et triste lassitude de vivre. La nausée lui broierait alors si vivement les entrailles qu’elle ne pourrait plus en échapper. Elle trembla à cette pensée et leva lentement le regard. Sachant pertinemment que Julien resterait muet, la jeune femme s’approcha de lui et lui glissa à l’oreille comme une excuse de premier choix :
- Cette fois c’est la fin Julien, le monde est devenu fou.

***

« Sergent Katina vous êtes convoquée le jeudi 15 décembre à 13h00 dans la salle d’entraînement de Radom afin que notre jury puisse évaluer vos compétences à la fois physiques et intellectuelles. Tentez de rejoindre le groupe des présélectionnés ! Si vous ne vous présentez pas vous serez lourdement réprimandée. »


Lena relut le bout de papier pour la centième fois avant de réaliser toute l’ampleur de la situation. Le 15 décembre, c’était aujourd’hui. Cela se concrétisait de trop pour n’être qu’une idée fantasque des gouvernements. Bien-sûr ce n’était pas une surprise. Cela faisait plus de six semaines que les nouvelles se succédaient en masse et faisaient la une de tous les journaux populaires. Tout ceci avait pris une tournure si affolante ! A l’heure actuelle, l’arène était déjà en construction et probablement serait-elle terminée avant la fin de l’hiver. En revanche l’endroit et la forme étaient restés secrets, sûrement pour garder une part de mystère et susciter l’engouement des peuples afin de leur faire oublier le fondement de ces jeux. Décidément quand il s’agissait d’idées sottes, les pays savaient étrangement s’entendre ! Tout semblait répondre à une mécanique d’une stabilité effrayante et personne ne réagissait. Personne n’osait s’exclamer : « Réveillez-vous ! Notre humanité se perd ! », non tout le monde se contentait de regarder bêtement les choses se mettre en place, en essayant de se convaincre que tout se passerait pour le mieux. Qu’est-ce qu’elle pouvait haïr tous ses hommes sans bras et aux vaines paroles ! Mais comment les blâmer ? Elle avait parfaitement conscience que toute cette mascarade ne concernait qu’une infime partie de la population. En effet, les candidats choisis, de 18 à 28 ans, devaient obligatoirement être militaires, pompiers, policiers ou encore sportifs. Sûrement considéraient-ils que ces 4 catégories étaient les mieux préparées à la compétition bien qu’elle ne fût pas réellement sure de l’être. Même si elle était une excellente soldate, elle n’avait absolument pas les compétences ou l’esprit assez vif pour affronter un pareil événement. Au moins cela la rassurait ; jamais elle ne serait sélectionnée. Elle s’y rendrait, passerait leurs tests et repartirait vivre sa petite vie tranquille loin des ennuis du monde. Oui c’est ainsi que cela se déroulerait. Un frisson parcourut son échine mais elle n’osa s’avouer qu’en réalité, elle tremblait d’une peur plus vile encore que toutes celles qu’elle avait déjà ressenties.
- Alors comment te sens-tu ? déclara Julien en se passant nonchalamment la main dans les cheveux.
- Bien, fit-elle en réprimant une grimace. Ne m’as-tu pas dit toi-même que je n’avais rien à craindre ?

Elle lui adressa un regard à la fois dur et angoissé. On pouvait aisément sentir la peur dans ces mots, dans la manière de les prononcer, tremblante et faible. Elle s’en aperçut et tenta de rire afin de détendre l’atmosphère :
- Cela fait si longtemps que je n’ai pas passé de tests, cela me rappellera mes jeunes années quand j’étais encore une étudiante pétillante, la tête remplie de rêves imprononçables. Ah comme j’étais heureuse, le destin droit et admirable ! Qu’il est comique de se rendre compte qu’il appartient désormais au passé…
- Ne sois pas ridicule, tu as la vie devant toi ; tu es toujours incroyablement jeune.
- Plus tant que ça.

Julien soupira ; il ne gagnerait pas la bataille. Cependant, il était vrai qu’avec ses cernes brunes et ses traits tirés par la fatigue, elle ne semblait plus si jeune. Elle paraissait lasse et amère comme si le monde entier lui avait transmis son poison. Oui, elle avait été empoisonnée par une humanité malade aussi noire qu’impure. Cela l’attristait car elle avait un jour incarnée une joie de vie touchante digne d’une enfant innocente et douce. Cela était en effet comique, très comique… S’il existait un Dieu, il était bien certain qu’il s’amusait à les regarder gesticuler plaintivement ! Il fit alors mine de regarder sa montre, sachant pertinemment l’heure qu’il était.
- Il va falloir y aller.

- Allons-y, murmura-t-elle faiblement.

Julien se gara devant un immense bâtiment où des centaines de personnes attendaient nerveusement. La jeune femme pouvait ressentir la crainte et l’appréhension se dégageaient de la foule. « C’est un piège et on le sait tous » pensa t-elle en portant sa main au front. « Nous sommes comme des animaux que l’on prépare à l’abattoir ». Elle inspira bruyamment avant d’ouvrir la portière d’un geste décidé mais une main la retint :
- Tu es sure que ça va aller ? lui demanda Julien d’une voix rauque.
- Evidemment ; tu sais comment je suis.


Elle se força à sourire et descendit de la voiture sans oser croiser son regard. Il s’inquiétait pour elle, peut-être même pensait-il qu’elle avait peur. Elle ne voulait aucunement qu’il le ressente ou pis, qu’il ait de la pitié pour elle. Rien n’était plus abjecte que la pitié ou la condescendance forcée. Elle s’enfonça dans la masse noire, dans l’optique de se rapprocher de l’entrée. Selon les indications de la lettre, il lui fallait trouver l’un des agents de sécurité qui lui donnerait un numéro de passage. Après une dizaine de minutes et quelques jeux de coudes, elle l’obtint : 112. Elle ne put s’empêcher de penser que tout ceci ressemblait davantage à un ordre d’exécution qu’à un simple test d’aptitudes. Mais elle chassa rapidement cette pensée de son esprit ; ce n’était pas le moment d’exprimer une quelconque faiblesse. Elle leva les yeux vers l’écran géant qui indiquait le nombre 65. L’attente allait être longue. Elle grommela un instant car la patience n’avait jamais été l’une des ses qualités premières. Au bout de deux heures et demi, son numéro s’afficha et elle ressentit d’abord une joie immense suivie d’un horrible coup de poignard dans le bas-ventre au souvenir du contexte. La gorge nouée, elle se fraya un chemin jusqu’à la porte principale où l’attendaient deux hommes en uniformes. Ils vérifièrent sa carte d’identité, tout en l’observant minutieusement, prenant bien soin de s’arrêter au niveau de la poitrine. Qu’est-ce qu’elle pouvait haïr cela ! « Ce n’est pas en louchant sur mes seins que vous allez vérifier quoi que ce soit, espèces de vieux  pervers ! » songea la jeune femme en grimaçant. Une fois l’inspection visuelle terminée, ils l’emmenèrent jusqu’à la salle d’examen. Elle était grande mais surtout très vide. En effet, rien ne recouvrait les murs mise à part une fine couche de peinture blanche, et on pouvait à peine distinguer le sol du reste de la pièce. Elle se rapprocha du centre d’un pas méfiant, craignant que les murs ne se referment sur elle. L’idée la fit sourire et tapota doucement son front : « Parfois je me demande si je ne suis pas folle ! ». Sa pensée fut interrompue par une voix robotique ce qui fit sursauter la jeune femme :
- Candidat 112, vous allez subir trois épreuves afin d’évaluer vos capacités de logique, votre sang-froid face au danger et votre méthode de combat. Etes-vous prêt ?

Lena prononça un misérable « Non » avant de se rendre compte que ce n’était qu’une vulgaire formalité. Bien évidemment, il n’existait aucun échappatoire possible. Brusquement, deux portes apparues devant elle, gardées par deux hommes de taille ridiculement petite. Soudain la vision des Oompa Loompa dans « Charlie et la Chocolaterie » lui vint à l’esprit et elle ne put s’empêcher de lâcher un petit rire : « Stop Lena un peu de sérieux ! ». La voix reprit du même ton glacial :
- Une seule de ces deux portes est la réponse à l’énigme. Pour trouver la bonne, il vous faut poser une question, répondant obligatoirement par oui ou par non, à l’un des hommes qui vous font face. Mais attention, un seul dit la vérité. Vous avez 5 minutes ».

La jeune femme soupira et acquiesça bien qu’elle ne fut pas sure d’être observée. Le test venait à peine de commencer que cela l’ennuyait déjà ! Elle se mit à réfléchir de toutes ses forces mais aucune question ne semblait faire l’affaire. Il était bien ridicule de se tuer les neurones pour une question réfléchie méticuleusement par plusieurs hommes pendant de nombreuses heures. Elle suspectait même l’énigme d’être insoluble mais elle n’avait pas le temps de le vérifier. Souhaitant en finir au plus vite, elle se plaça devant la porte de droite avant de déclarer froidement :
- C’est celle-là.
- Quelle était votre question ?
- Je n’en ai pas posée car l’épreuve est impossible dans de telles conditions. J’ai bien peur d’avoir choisi la porte de droite par pur instinct.

Sa réplique répondait peut-être du banal mais au moins, on lui ficherait la paix.

- Votre réponse a été enregistrée. Tenez-vous prêt pour la seconde épreuve. Seul un véritable gagnant sait faire face dignement à ses peurs.

Lena déglutit avec difficulté. Des frissons parcoururent son corps avec une rapidité angoissante ; tout cela ne présageait rien de bon. Des peurs, elle en avait des milliers. Toutefois, elle resta calme. Un bon sergent ne devait jamais montrer ses faiblesses, il devait rester ferme, inexpressif et garder ses infâmes sentiments bien enfouis dans un coin sombre. La jeune femme se mit donc en position de combat et écouta le silence dans l’espoir d’y trouver un signe. Rien. Brusquement un tremblement assourdissant se fit entendre. Il lui fallut un moment avant de comprendre d’où il provenait. « Mais les murs bougent ! ». Elle fût alors saisit d’un effroi épouvantable et un spasme hideux lui parcourut tout le corps : « Ce n’est pas possible, ils ont dû lire dans mon esprit ! ». Bien que cette explication ne la satisfasse nullement, elle n’avait guère le temps d’y réfléchir plus longtemps. En effet, les murs se resserraient de manière fulgurante autour d’elle si bien qu’elle pouvait presque sentir ses os craquer, se tordre sous le coup de la pression. Elle regarda rapidement chaque mur : il n’y avait rien à faire. L’épreuve avait été conçue pour qu’elle échoue. Elle ferma donc les yeux et attendit la mort. Elle n’avait aucun regret.
***

Les minutes lui semblaient incroyablement longues. Les murs auraient déjà dû l’écraser depuis un moment. Lena était tiraillée entre l’idée de jeter un coup d’œil et la peur de se trouver nez à nez avec la terrible faucheuse comme dans les cartoons de mauvais goûts. Elle prit cependant sur elle, et entrouvrit une paupière. La salle était revenue à la normale et la porte était à nouveau ouverte. Qu’est-ce que cela signifiait ? Aurait-elle rêvé ? Soudain, l’un des hommes qui l’avaient accompagné apparut et lui dit :
- Que faîtes-vous encore là ? Votre test est terminé depuis déjà 5 minutes ! Dépêchez-vous le candidat suivant attend !
- Comment ? balbutia la jeune femme manifestement surprise d’une telle annonce. C’est impossible, je n’ai même pas passé la troisième épreuve !
- C’est étrange en effet, mais l’écran à l’entrée est passé au numéro suivant. Je suis désolé mademoiselle, vous devez partir.

Lena acquiesça lourdement et le suivit sans broncher encore toute retournée par les événements. Pourquoi ne lui avait-on pas fait passer le troisième test ? Sûrement l’avait-on jugée comme une perte de temps, incapable d’exceller à de simples épreuves. Au final, la jeune femme ne pouvait s’en préoccuper moins, en bon sergent, elle avait participé ; dorénavant on la laisserait tranquille. Elle rejoignit la voiture d’un pas pressé, délestée d’un poids étrange dont elle n’avait jamais vraiment su la cause. Sans un mot et un regard, Julien démarra. Il savait bien que parler aurait été aussi vain qu’implorer la pitié d’un meurtrier. C’était à elle de décider l’heure de la discussion. De retour à la maison, Lena se traîna mollement jusqu’à son canapé en cuir et contempla le plafond d’une mine pâle et vide. Le jeune homme lui apporta une tasse de thé qu’elle accepta d’un geste fébrile. A peine eut-elle trempée ses lèvres dans le breuvage que le mutisme dont elle semblait prisonnière s’envola :
- Ils ne m’ont pas laissé passer ma dernière épreuve. Ils ont dû avoir pitié de mon piètre niveau.

Julien fronça les sourcils et la laissa continuer de peur de la bloquer :

- J’allais mourir écraser par le poids des murs qui se resserraient autour de moi, il n’y avait rien à faire je le sentais. J’ai donc tout naturellement fermé les yeux et tout a disparu ; le test était fini sans autre explication. Je suis comblée de honte, suis-je à ce point mauvaise soldate ? Ne puis-je pas espérer mieux que de vulgaires railleries ? Parfois, je me dis que j’ai vraiment tout perdu.

- Je suis encore là, risqua le jeune homme en la prenant dans ses bras.

- Ce n’est pas pareil, déclara t-elle d’un ton dur comme s’il venait de perturber sa réflexion. Tu es obligé de rester ; tu es amoureux. Ce que j’ai perdu n’est pas interchangeable contrairement à toi. Si tu n’étais pas là, un autre prendrait ta place.

- A mes yeux, personne ne pourra jamais te remplacer.

- Tu es bien jeune, c’est normal, souffla t-elle en caressant d’une main tendre le visage du garçon. Tu ne connais rien à l’amour. Tu vis dans une bulle composée d’idéal et de belles passions irraisonnées. Malheureusement, la vie ne se construit pas ainsi. Dans quelques années, tu te riras de mon nom et tu répéteras les mêmes mots d’amour que tu me souffles aujourd’hui, à ta conquête du moment jusqu’à la suivante. C’est une tromperie du cœur dont nous usons aisément afin de ne pas céder aux regrets et au malheur.

Julien la regarda ardemment épris à la fois d’admiration et de dégoût fortuit. Comment pouvait-on avoir le cœur aussi glacial? Comment pouvait-on être si hostile à la conduite de l’humanité ? Par moment son esprit superstitieux lui soufflait qu’elle n’avait rien d’humaine. Derrière sa beauté ensorcelante se cachait une créature insensible au fardeau des sentiments, à la peau si dure qu’aucune lame de couteau ne pouvait en venir à bout. Pour preuve, toutes les tentatives de suicides de la jeune femme avaient été un échec foudroyant, ne provoquant que quelques blessures superficielles. Il en venait à croire qu’elle était maudite, prisonnière d’un monde qui n’était pas le sien.
- Il faudra bien que tu refasses confiance aux Hommes, fit-il après une longue pause. Et cela très bientôt si tu veux avoir une chance de survivre dans l’arène une fois choisie.

- Cela n’arrivera pas, je t’ai dit avoir raté mon test ! s’énerva Lena en se tortillant ardemment sur son fauteuil.

Ses traits avaient changé ; elle était belle à faire peur. Ses yeux s’écarquillaient prenant une légère teinte émeraude magnifique et sa bouche comprimée par la colère et la mélancolie, la rendait exquise au regard. Julien détourna le regard et inspira une grande bouffé d’air avant de déclarer d’une voix amusée :
- Si tu veux mon avis, tu as si bien réussi ton test qu’ils ont dû l’arrêter tant tu les as impressionnés. Comme je te connais, tu n’as pas dû te prêter au jeu, tu as voulu achever les épreuves au plus vite. Tu t’es abandonnée facilement à l’instinct et tu as accepté le danger voire la mort d’un calme incroyable. Dans une arène, ce sont des qualités inestimables qui peuvent sauver la vie. Sans le savoir tu t’es gracieusement offerte à l’ennemi, te trahissant toi-même. Tu peux être fière ma belle, tu es incontestablement l’une des présélectionnés !
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HannahP22 ThiaudièreSarah




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MessageSujet: Re: The Imaginary Games - HannahP22   The Imaginary Games - HannahP22 Icon_minitimeDim 9 Aoû 2015 - 12:37

La fameuse prédiction de Julien ne prit pas longtemps à se réaliser. En effet, une semaine plus tard Lena recevait déjà un courrier lui affirmant sa glorieuse admission à la base militaire de Varsovie où tous les sélectionnés devaient résider une semaine avec une succession d’épreuves qui désigneraient à la fin l’heureux représentant de la Pologne. La jeune femme n’avait pas décroché un mot depuis ce jour. Elle était tombée dans un mutisme effrayant qui n’aurait pas été surprenant s’il ne s’était pas accompagné d’un sourire étrangement lubrique. Il semblait clamer haut et fort « Venez à moi délectables souffrances, venez me faire jouir de vos maux avant que je ne m’effondre de cette atroce lassitude qui pourrit l’intérieur de mes entrailles !». Pour peu, on aurait pu croire que cela la libérait d’une vie meurtrière qui aurait fini par aspirer toute la joie de ses sourires. Elle semblait véritablement heureuse de quitter sa pauvre vie machinale, d’embrasser la mort à pleine bouche. Sûrement n’était-elle pas faite pour ce monde sanglant et vide.
La jolie rousse soupira et releva la tête vers ses adversaires ; elle était à la base militaire depuis seulement une heure et elle pouvait déjà affirmer impunément qu’elle ne se ferait pas beaucoup d’amis. En effet il y avait beaucoup d’hommes et en particulier des jeunes garçons à l’arrogance fière et pénible. Tous bombaient le torse de manière parfaitement grotesque et scrutaient la foule tels des loups prêts à bondir sur leur proie. Lena comprit qu’il serait raisonnable de se faire discrète si elle ne voulait pas subir leur instinct bestial et primitif. Brusquement, elle se demanda ce qu’elle faisait à leur côté. Elle n’avait rien du profil du héros grec aux muscles saillants assoiffé de carnage et au charisme irréprochable. De plus, elle était une femme ; et quel pays censé souhaiterait être redevable à une figure féminine ? Elle savait bien que pour toutes ces raisons le choix du jury se porterait davantage sur un gars du type de Iwan Solski, un brillant militaire dont les interventions étaient reconnues par delà le pays. Il était courageux, intelligent, beau garçon et il prenait un malin plaisir à le faire savoir. Même ses amis semblaient être convaincus de sa prochaine victoire. Certains comptaient d’ailleurs bien contribuer à sa réussite, ce qui ne rassurait guère la jeune femme. Il lui faudra redoubler de méfiance et ouvrir l’œil plus grand encore. Même s’il était certain qu’ils ne se préoccuperaient pas d’elle en premier, elle n’aurait que peu de répit.
A peine eut-elle le temps de songer à autre chose, qu’un jeune homme en uniforme, propre sur lui et bien bâti, fit son entrée. Il était d’une grandeur désarmante et son visage aux traits bien marqués inspirait le respect. Sans raison apparente, Lena ne put s’empêcher de l’imaginer tout nu ce qui la fit rougir pendant quelques secondes. Elle s’étonna elle-même car elle n’avait pas pour habitude de céder à ce genre de pensées désobligeantes. Elle n’avait jamais été une femme très portée sur le sexe et les hommes lui avaient souvent reproché de ne pas s’impliquer davantage aux jeux du lit. Mais cela ne l’avait jamais dérangée grandement puisqu’ils restaient toujours malgré tout. Elle savait y faire avec eux, il lui suffisait de leur faire un signe de tête pour qu’ils accourent chez elle un bouquet de roses à la main. Cependant, elle n’était jamais tombée amoureuse de l’un d’entre eux ; pour tout dire les hommes l’ennuyaient. Ils avaient beau être gentils, mignons et protecteurs, cela ne lui convenait jamais. Elle était venue à la conclusion qu’elle n’était pas faite pour l’Amour et ses délices. Heureusement, cela ne la gênait guère. Son attention se reporta sur l’homme en uniforme qui venait de se positionner devant le micro, le teint grave il s’exclama :

- Mes sincères salutations mes chers candidats d’un monde meilleur ! Je suis le lieutenant Miroslaw Zentara et je suis fier de vous accueillir à la base militaire de Varsovie ! Il ne nous reste que très peu de temps pour désigner le représentant de notre pays. Dans une semaine, jour pour jour, nous nommerons le vainqueur, celui qui mènera notre peuple si souvent piétiné par les grands du monde, au devant de la scène internationale ! Je serais alors le mentor du gagnant et je le formerai. Mais avant cela, nous devons vous soumettre à une simulation et celui qui en sortira le moins… abîmé pourra continuer l’aventure.

Il rit d’une voix gutturale et leur ordonna de le suivre. Les candidats se ruèrent à ses côtés et essayèrent de se faire remarquer par des flatteries qui paraissaient complètement inefficace. Lena dût se laisser entraîner par la foule de peur de se faire écraser et ne toucha le sol que cinq cent mètres plus loin. Miroslaw Zentara semblait s’amuser de toute cette agitation et leva la main pour leur faire signe de se taire.

- Comme nous n’avons pas les moyens de construire une arène à échelle réduite, nous avons décidé de vous y envoyer virtuellement à l’aide de cette énorme machine que vous avez sous les yeux. Mais attention, virtuel ne veut pas dire que vous pouvez échapper aux blessures. Tout sera réel. Si vous êtes ici c’est que la mort ne vous effraie pas ou bien que vous êtes suicidaire mais ça, cela ne nous regarde pas. Toutefois, le but n’étant pas de créer un massacre, il est interdit de tuer sous peine de lourdes sanctions. Si vous êtes amenés à vous battre, retenez vos coups et ne visez jamais rien d’autres que les épaules ou les jambes. Vous serez peut-être mutilés mais rien dont vous ne pourriez survivre. Bien-sûr la mort n’est pas exclue ; si quelqu’un meurt pendant l’épreuve, nous n’y serons pour rien.

Un autre rire grave résonna de nouveau dans la salle et la jeune femme ne put s’empêcher de crier :

- Vous êtes en train de dire que vous ne serez pas punis pour nous avoir envoyés à la mort ? Cela ne suffit-il pas de forcer des innocents à se battre jusqu’au sang pour un conflit dont nous ne savons quasiment rien ? Avez-vous réellement besoin de nous mettre en danger de mort, ou de nous mutiler pour choisir votre satané représentant ? Dans ce cas, je suis prête à me porter volontaire plutôt que de laisser des personnes mourir inutilement.

Le lieutenant Zentara parut surpris par l’intervention et rechercha la coupable des yeux. Il sourit en découvrant le visage de la jeune femme comme s’il venait de la reconnaître et rétorqua d’une voix amusée :

- Si je vous disais que le danger n’existait pas, vous ne décuplerez pas toutes vos capacités. La peur renforce les sens sergent Katina, et nous rend bien plus forts vous devriez le savoir. Vous ne devriez pas avoir peur de mourir ; le risque est votre métier. Regardez bien autour de vous, les hommes que vous voyez ne craignent pas la mort et sont là pour gagner. Leur vie ne sont pas importantes et s’ils ne meurent pas en essayant de sauver leur pays, ils mourront seuls sans avoir rien accompli et cela leur est impossible. Ici, on leur offre un moyen de changer leur vie mais aussi leur mort. Dîtes-moi sergent Katina, votre vie est-elle à ce point fabuleuse pour jouer la carte de la prudence ? Votre prestation lors des tests confirmait plutôt le contraire. Vous n’avez même pas lutter pour vous sauver ; c’était du jamais vu. Si vous êtes parmi nous en ce jour, c’est parce que vous avez su aller au delà de votre condition humaine en surpassant votre instinct de survie qui aurait dû vous pousser à vous arracher les bras en essayant de repousser les murs. Mais vous n’avez pas bouger ; cela était extrêmement impressionnant surtout de la part d’une jeune femme qui a encore toute la vie devant elle. Je ne vous cache pas que vous choisir me tente bien. Vous avez toutes les qualités requises. De plus vous m’apportez un point stratégique capital : vous êtes une femme, et mignonne pour ne rien gâcher. Je ne crois pas que beaucoup de pays choisiront autre chose qu’un jeune homme vigoureux et gorgé de muscles. Ils se baseront avant tout sur le physique or ce n’est pas forcément celui qui court le plus vite qui gagne la course, n’est-ce pas ? Ainsi personne dans l’arène ne fera attention à vous, surtout que vous êtes encore inconnue dans le monde militaire donc aucune méfiance possible. Oui vous me tentez bien sergent Katina… prouvez-moi que vous êtes à la hauteur et je vous choisirai !

Il s’arrêta un instant pour s’humidifier les lèvres avant de reprendre :

- Cet aparté étant fini, je peux reprendre mes explications…

Lena avait cessé d’écouter. Elle pouvait déjà sentir les regards brûlants de haine de ses camarades se poser sur elle. En effet, en vantant ses mérites, Zentara s’était vengé de son intervention. Maintenant tout le monde allait la prendre pour cible. Surtout que beaucoup d’hommes voyaient en l’idée de se faire battre par une femme, une humiliation sans nom. Pourquoi ne savait-elle pas se taire ? Mais elle n’eut pas le temps d’approfondir la question car des soldats venaient d’entrer dans la salle et leur distribuaient à présent des casques à l’allure drôlement futuriste. Pour peu, la jeune femme aurait pu se croire dans une série américaine où les gadgets incroyables et les effets spéciaux démontraient une volonté virulente d’impressionner.

- Ils vous permettront dans quelques instants de rejoindre le monde virtuel, continua Zentara sans se préoccuper de l’agitation qu’avait provoqué l’arrivée des casques. Je vous préviens toutefois que le temps là-bas n’est pas le même qu’ici. Trois heures virtuelles équivaut à une journée terrestre. Vous y resterez donc en tout seulement 21 heures. Nous ne savons pas réellement quel genre d’épreuves l’arène proposera donc nous avons opté pour une simple épreuve : vous serez plongés dans une forêt de nuit avec pour seule arme un couteau. Pour trouver la sortie, il y aura des balises à votre disposition. Cependant elles se détruiront dès qu’un candidat les découvre. C’est comme une course d’orientation ! Facile non ?

Le silence glacial planant dans la salle démontrait tout l’opposé. Avec Miroslaw Zentara, il fallait s’attendre à tout… sauf au meilleur.  

*

Lena se réveilla dans ce qui ressemblait vaguement à une infirmerie, n’ayant pas le moindre souvenir des derniers événements. Un vague flash blanc lui apparaissait mais aucune autre image semblait vouloir se former dans son esprit. Seule une intense brûlure à l’épaule la maintenait à présent dans un état de flottement quasi illusoire. Elle se sentait comme une statue froide prête à se briser, sa gorge était cerclée d’un nœud horrible, et sa bouche était souffre. Elle ouvrit péniblement les yeux et découvrit Miroslaw Zentara qui attendait sagement à son chevet une tasse de café à la main.

- Comment vous sentez-vous ?

Sa voix lui semblait blême, safranée, sûrement même un peu noire…Il y avait là une tristesse désobligeante qui l’ennuyait.

- Confuse… finit-elle par articuler avec difficulté.

- C’est normal. Nous vous avons tous injectés un sérum afin que vous oubliez tout ce qu’il s’est passé dans l’arène. Il est juste que tous les candidats aient le même entraînement et les mêmes chances une fois dans l’arène or chaque pays à sa manière de procéder voyez-vous. Ainsi le sérum a été imposé pour respecter l’équité. Et puis, il faut bien garder une part de mystère…  Mais je peux tout de même vous dire que vous m’avez agréablement surpris lors de cette épreuve. Dommage que quelqu’un vous ait devancé. Sachez que j’ai tout fait pour vous recommander au Conseil seulement le règlement est clair. Seul le gagnant de l’épreuve sera notre représentant. Je pense que c’est une terrible erreur car grâce à vous nous aurions eu toutes les chances de gagner. Et…

- Je vous arrête toute suite Lieutenant, déclara t-elle d’une voix faible, la tête bourdonnant étrangement. C’est encore un de vos tests je présume ? Ce n’est pas à moi de vous convaincre de me choisir ou non. Vous connaissez à présent mes capacités, je n’ai rien d’autre à prouver. Maintenant laissez-moi me reposer en paix.

Miroslaw Zentara leva un sourcil d’étonnement mais ne protesta pas. La jeune femme savait que l’on ne tarderait pas de lui annoncer sa victoire et elle ne se trompait pas. Le lendemain, sa victoire fût officielle et elle fût transférée de suite au département privé de Paris, afin de lui éviter le contact désagréable d’une presse enragée, où les autres représentants l’attendaient. Zentara ne l’avait pas quittée de tout le voyage. Il ne cessait de la bombarder de remarques, conseils qu’elle écoutait d’une oreille distraite. Elle avait du mal à croire en la réalité des événements. Elle pensait à Julien ; elle songeait à son visage inquiet et sûrement terrible à l’annonce de son élection. Elle ne pouvait à peine se figurer son effroi et se plongea alors dans un mutisme dont elle parvenait difficilement à se séparer. Arrivés à destination, Zentara la guida directement à ses appartements et une séance intense de relooking commença. Son mentor lui expliqua qu’il voulait à tout prix diffuser une image de fille sans défense ; ce masque serait selon lui son billet de survie. Elle était trop abasourdie pour protester ses dires. Une heure plus tard, elle put enfin rencontrer ses adversaires. Comme elle le pensait, il n’y avait que des hommes à l’exception de l’Australie qui avait choisi une jeune femme mais à son air carnassier elle ne s’en ferait pas une amie. Elle remarqua soudain un jeune homme, légèrement en retrait, qui ne cessait de la fixer d’un regard qu’elle n’aurait su qualifier proprement. Il avait de grands yeux bleus cernés d’un halo ombreux et une bouche légèrement enfantine. En vérité, elle n’avait jamais connu plus triste figure. Son teint était âcre et maladif, son front ténébreux, ses lèvres ourlées et son nez, tragique et mystérieux, lui donnaient l’air d’un être à peine vivant. A force de contemplation, on pourrait presque se méprendre sur son sexe, tant il avait des traits fins et raffinés. Lena vint à sa rencontre et à son plus grand étonnement, ce dernier lui tourna le dos. Elle se rapprocha de lui et fût surprise de sentir chez lui, une odeur étrangement féminine.

- Excusez-moi Mademoiselle, se risqua t-elle gravement, mais je crois que vous vous êtes trompés d’habits. Venez dans ma loge et je vous prêterai volontiers une robe.

L’ « homme » sembla paniquer mais la jeune femme prit un ton rassurant :

- Ne vous inquiétez pas il n’est pas dans mes plans de vous dénoncer. Votre déguisement est imperceptible à l’œil nu, je ne l’ai remarqué seulement parce que je vous ai dévisagé longuement. Comment vous appelez-vous ?

- Mikhaïl Macharov, représentant de la Russie, répondit-elle fermement.

- Bien-sûr.. murmura t-elle lentement. Et bien Mikhaïl, nous appartenons tous deux à une même vision politique. Si l’envie vous en prend je serai ravie de pactiser avec vous.
- Je n’ai que faire de pactiser avec une poupée délurée, cracha-t-elle en l’observant de haut en bas. Maintenant cessez de m’importuner.

Lena ne s’offusqua pas et s’éloigna.

Après une soirée pleine en émotions et de rencontres inutiles, la jeune femme décida de s’octroyer une balade nocturne non loin des quais illuminés. Alors qu’elle sillonnait la ville d’un pas indéterminé, elle ne put s’empêcher de repenser vivement à ses jeunes années où son père lui faisait visiter tout Paris, dès qu’il le pouvait, louant sa beauté ensorcelante à chaque coin de rue. Il ne cessait de répéter qu’il était important de s’imprégner du merveilleux de cette ville, d’en goûter les secrets les plus intimes afin d’acquérir une sensibilité proche de la création artistique, une humanité plus belle, plus honnête. A l’époque, elle le croyait aveuglement. Mais aujourd’hui elle ne pouvait s’empêcher de songer aux visages tordus, grisés d’une étrange tristesse, à cette jeunesse blafarde au ton presque cadavérique qui l’entourait. Tout était mort et vide. Où étaient les sourires et les yeux pétillants dont il lui parlait avec tant d’ardeur ? Son père semblait ne jamais s’être aperçu de la tromperie ; il s’émerveillait toujours de sifflements inexistants, de rayons lumineux sur des pavés cuisants jusqu’aux pieds les plus habiles et de jeux d’amours pervertis. Aujourd’hui encore, elle ne comprenait nullement l’illusion qui le tenait. Elle ne pouvait apercevoir autre chose que le visage d’une ville hâve, jaune, tannée par l’ennui et le remord. Sûrement n’était-ce pas la ville en réalité qui lui semblait si terrible. Elle s’assit alors sur un banc et ferma les yeux. Elle était fatiguée d’avoir trop souri et lasse de ces propos politiques interminables qui l’ennuyaient. Brusquement une main lui toucha le bras. Elle émit un cri de stupeur puis se calma en remarquant les traits de Mikhaïl.


- Que faîtes-vous ici, Monsieur ?

Elle avait insisté sur le dernier mot pour lui faire comprendre qu’elle n’était pas la bienvenue.

- Vous m’avez dit plus tôt de venir vous emprunter une robe.

Son ton était dur comme si être à ses côtés était une torture difficilement avouable. Lena croisa les bras vigoureusement et formula d’un rire parfaitement railleur :

- Est-ce là bien nécessaire ?

- Ne riez pas, vous m’avez démasquée ; jouons franc jeu. Je suis curieusement fille, vous êtes femme de mauvaise fortune. Nos destins ne sont pas si étrangers.

- Non en effet… murmura t-elle faiblement.

Un moment terrible de gêne s’ensuivit et la jeune femme ne put s’empêcher de fixer son interlocutrice avec avidité. Sans en connaître la raison, elle se sentait proche de cette jeune femme au regard de glace dont toute étincelle de vie semblait s’être remplacée par une rage destructrice.

- Pourquoi me regardiez-vous ainsi tout à l’heure ?

- Je vous trouvais simplement joli garçon.

- Ah vous les femmes, voilà ce qui vous mène ! déclara t-elle d’un ton accusateur. Mais rassurez-vous je suis aussi jolie fille.

- Cela ne me regarde pas.

- Ou plutôt cela ne vous regarde plus ; ceci est d’un comique stupéfiant.

- Ne faîtes pas l’enfant ! s’agita la jeune femme en élevant la voix. Si ce genre de situation vous déplaît tant, cessez de jouer vilainement avec votre apparence. D’ailleurs pourquoi donc ce déguisement ?

Elle sembla réfléchir un instant, levant les yeux au ciel, avant de répondre étrangement :

- Disons que j’ai l’ambition de prouver à mon pays qu’une femme peut égaler voire surpasser l’homme.

- La Russie n’est pourtant pas le plus mauvais sur ce point.

- Quand j’ai exprimé cette idée à mon entourage, on m’a cruellement rit au nez. Il me suffirait d’obtenir la victoire pour que mon pays et même le monde entier reconsidèrent non seulement leur politique mais également leur morale.

- Quel rêve ! sourit Lena.

- Cessez vos injustes moqueries ; vous m’aiderez. A présent vous m’êtes liée.

- Et de quelle triste façon ?

- Vous le découvrirez demain.
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MessageSujet: Re: The Imaginary Games - HannahP22   The Imaginary Games - HannahP22 Icon_minitimeDim 9 Aoû 2015 - 12:39

Le lendemain, Lena fut réveillée à 6h par Zentara qui l’extirpa de son lit afin de subir une séance de maquillage intensive. Il lui apprit qu’une interview de cinq minutes de chaque candidat allait être effectuée lors d’une émission en direct vers 11h. Il lui conseilla de répondre le plus naturellement possible et lui donna alors une fiche avec des réponses déjà formulées. Lena sentait ses jambes tressaillir sous l’effet de la surprise ; cela lui ferait si étrange de se savoir observer par des millions de téléspectateurs ! Elle n’avait jamais été très douée pour se faire aimer. Elle n’avait pas, disait-on, le charisme ou l’envie suffisante et cela lui convenait très bien. A 10h45, elle fut conduite jusqu’au plateau et la peur lui assaillit de nouveau l’estomac. Une fois les derniers préparatifs terminés, l’émission débuta et les candidats défilèrent. Les questions étaient souvent grotesques et ne servaient qu’à inspirer la sympathie du public. « Mikhaïl » passa le 35ème. Elle avança sur la scène d’une confiance déconcertante et vint serrer la main du présentateur d’une poigne vigoureuse. Après les salutations ordinaires et quelques échanges sans grande importance, l’interview commença :

- Craignez-vous les jeux de demain Mikhaïl ?
- Nous avons tous peur vous savez, rétorqua-t-elle avec lucidité. Même ceux qui prétendent le contraire. Mais je me battrai corps et âme en ce dont je crois !
- C’est ce qu’on appelle une réponse honnête ! plaisanta le présentateur à l’égard du public.
- Votre petite-amie doit être très fière de vous ! reprit-il avec un clin d’œil ridicule.
- Hélas Monsieur, mon cœur saigne ! La femme dont je suis éperdument amoureux a été élue par son propre pays pour devenir représentante. Vous pouvez aisément concevoir mon malheur !
- Il est vrai que c’est une coïncidence fâcheuse… Pouvons-nous savoir de qui il s’agit ?
- Il s’agit de Lena Katina…

Il avait murmuré le nom si doucement que certaines femmes soupiraient à présent pour ce jeune homme à l’amour si pur et à la grâce si touchante. La jeune femme, elle, ne respirait plus, abasourdie par l’annonce de son nom.

- Ah oui, la belle polonaise ! Au moins vous n’êtes pas ennemis politiques ! rit-il en se tapant les mains. Et bien mon cher Macharov, je crois que nous sommes tous impatients de la rencontrer ! Faîtes-la donc entrer !

Le cœur encore tremblant par les événements, la jeune femme fut poussée sur le plateau sans qu’elle ne puisse contester quoique ce soit et « Mikhaïl » vola furtivement vers elle et l’embrassa sur la joue avant de lui prendre la main comme si tout cela était parfaitement naturel. Une fois assis, le présentateur leur posa de multiples questions sur leur prétendu couple dont le jeune « homme » répondait toujours d’une formule simple mais intelligente qui semblait captiver le public au point qu’ils ne pouvaient détacher les yeux de sa bouche. Lena fût elle-même presque convaincue de la réalité des choses ! Le présentateur se tourna alors vers elle, jugeant le temps de Mikhaïl terminé, et enchaîna les questions :

- Dîtes-moi Lena, qu’est-ce que cela fait d’être l’élue de votre pays ?

Il avait adopté un ton intime presque importun dont la jolie rousse avait du mal à faire face.

- C’est effrayant, répondit t-elle en souriant vaguement.
- Vous inquiétez-vous pour Mikhaïl ?
- Non je sais qu’il s’en sortira sans peine, s’exclama t-elle en s’efforçant de regarder son « petit-ami » dans les yeux.
- Mais vous ?
- Et bien, moi je verrais. Je défends les valeurs de mon pays mais encore faudrait-il qu’on m’en laisse le temps…

Des rires se firent entendre dans la salle. Le public semblait aimer ce personnage modeste et modéré si rare de nos jours. L’interview continua ainsi quelques minutes avant qu’un baiser soit attendu, crié par le public enflammé par cet amour amusant et incongru qui rendait les jeux un temps soit peu humains. Son cœur avait cessé de battre au contact des lèvres de « Mikhaïl » ou plutôt de la jeune femme, si chaudes et douces qu’elle ne s’étonna à peine de l’étrangeté de la situation.

*

Sa main était rouge tant elle avait frappé fort. Elle regardait avec fureur la jeune femme qui se tenait la joue, se retenant certainement de pleurer. Dans l’obscurité de la chambre, Lena pouvait déceler le sourire horrible et sardonique de Miroslaw Zentara qui semblait se satisfaire de ce qu’il voyait.

- Ne soyez-pas en colère contre elle et ses mensonges, déclara t-il en haussant les épaules. Si vous aviez su la machination, vous auriez refusé.
- C’est certain ! s’écria t-elle. Laissez ce genre de plan tordu à ceux qui n’ont pas d’autre ambition que le divertissement ; cela ne m’amuse pas.
- Et pourtant, il marche à merveille ! s’entêta Zentara en regardant successivement les deux jeunes femmes. Plus votre réputation sera grande, plus le public vous offrira la victoire de part de nombreux dons.
- Car en plus vous forcez les peuples à payer ?
- Ce n’est que d’ordre patriotique vous savez.


Il se frottait à présent les mains de façon étrangement délirante et Lena eut le pressentiment que rien n’aurait pu le libérer de sa folie.

- Je vais être franc, reprit-il vivement. Lorsque j’ai passé ce pacte avec le dirigeant de la Russie, je ne me doutais pas encore que je choisirai une femme et Yulia avait été choisie secrètement bien avant, étant la fille d’un militaire célèbre. Ainsi vous voir triompher de l’épreuve ne fut pas spécialement une joie pour moi. Cependant, vos qualités étaient évidentes et je ne pouvais pas me permettre de prendre quelqu’un d’autre. C’est alors que nous avons décidé de travestir Yulia ; un couple homosexuel aurait sans doute été néfaste, voyez-vous. Retenez que vous êtes deux et que cela vous aidera grandement pendant les épreuves. A la fin, vous vous séparerez et il faudra laisser le sort choisir la meilleure !

Sur ce, il quitta la pièce et laissa les deux jeunes femmes seules. Le silence était tranchant et Lena pouvait deviner la gêne de cette « Yulia » qui, malgré tout, ne cessait de l’attendrir.

- Je suppose qu’ils auraient pu me choisir un bien plus hideux petit-ami, rit-elle pour lui faire comprendre qu’elle souhaitait un nouveau départ.
- Ne crois pas que cela m’enchante ; me travestir, faire semblant d’être avec une inconnue… tout cela m’est aussi étranger que cela ne l’est pour toi.
- Mais que devrons-nous faire ?

Son ton avait été si faible que cela amusa la jeune femme aux cheveux de jais.

- Le public va s’attendre à ce qu’on reste ensemble durant toute la durée des jeux, répondit-elle en croisant les bras. Quelques baisers et petits surnoms amoureux ; cela devrait suffire à combler leur appétit.

- Et bien si je m’avais un jour figuré dans les bras d’une fille, j’aurai certainement bien rit.

- Techniquement je suis un garçon. Surtout ne te trompes pas dans l’arène car cela pourrait nous être fatal.

Lena acquiesça et échappa un petit cri de surprise en découvrant l’heure tardive. Elles allèrent respectivement se coucher ; demain un autre monde les attendait.

***

Lena se réveilla, allongée sur une herbe désagréablement mouillée, et se demanda par quel ridicule enchantement elle avait pu se retrouver en une pareille posture et habillée d’une combinaison de combat sophistiquée. Yulia gisait à ses côtés encore endormie et elle dut la réveiller d’une tapette amicale. Une fois levées, les jeunes femmes se regardèrent paniquées, ne sachant que faire ou quoi formulées. Elles n’eurent le temps de se poser davantage de questions car une voix retentit violemment :



«  Chers candidats du monde ! Bienvenue dans l’arène qui déterminera quel pays mènera les autres. Ne soyez pas effrayés par l’endroit où vous vous trouvez. Nous vous y avons simplement transférés cette nuit afin que vous puissiez en observer sa configuration. L’arène a été divisée en 4 zones qui comporte chacune une épreuve différente. Le but est d’en faire le tour et de déjouer les pièges des trois premières zones afin d’accéder à la quatrième où la bataille des survivants s’effectuera. Pour l’heure, vous avez tous été dispersés mais vous vous croiserez assurément… Une dernière chose : sachez bien que tout ce que vous voyez n’est qu’un pur hologramme ainsi ne vous étonnez pas d’étranges phénomènes ou de situations incongrues. Sur ce que le spectacle commence ! »

La voix se tut. Un léger frisson parcourut l’échine de la jeune femme et elle osa enfin lever les yeux vers cette arène tant attendue. Devant elles se dressait une ligne d’arbres gigantesques, aux troncs épais, à l’écorce rouge vif et dont le feuillage semblait se perdre à perte de vue. Une herbe rougeâtre et caoutchouteuse recouvrait le sol. Vivante, elle bougeait étrangement tel des insectes grouillant horriblement. Une odeur chaude et moite se dégageait de cette jungle rouge et des oiseaux à la taille effrayante rasaient la cime des baobabs.

- On se croirait revenu à la préhistoire, plaisanta Yulia dont les cheveux trempés collaient sur son front.
- Comment va t-on faire pour trouver la sortie de cette première zone ? demanda t-elle avec une lueur de désespoir dans la voix. Nous n’y voyons rien à plus deux mètres.

En effet, des grands arbres, semblables à d’immenses dents pointues, bouchaient l’horizon et elle songea alors qu’ils avaient un air étrangement vivant. Toute cette jungle n’avait rien d’une forêt ordinaire. Ici, les racines s’entremêlaient au sol telles de féroces serpents prêts à vous piquer de leur venin. Lena observa le contenu des sacs mis à leur disposition composé d’une lampe de torche, d’une boussole, d’un briquet, et une gourde d’eau remplie, mais rien ne semblait convenir. En ce qui concernait les armes, elles avaient un couteau et un sabre de brousse que Yulia s’empressa de manipuler avec adresse.

- Avançons, suggéra cette dernière, cela ne sert à rien de rester ici. Nous perdons du temps.
- Attends ! Ces arbres ne m’inspirent pas confiance. Ils m’ont l’air dangereux. Regardes comme leurs racines bougent et gonflent !
- Tu as raison, souffla t-elle en reculant. Je crois même apercevoir une main humaine coincée entre deux racines. Il est possible que quelqu’un soit passé sans que nous nous en soyons rendues compte. Peut-être même avait-il l’idée de nous prendre par surprise mais il n’a pas fait attention au piège de ces arbres.

Lena frissonna. Elle commençait à croire qu’elle ne reviendrait pas vivante de ce voyage. Yulia lui prit la main et la rassura :

- Ne nous affolons pas. Il nous suffit d’éviter de marcher sur les racines et les arbres ne devraient pas détecter notre présence.


Retenant leur souffle, elles s’engagèrent dans la forêt. Les baobabs avaient tissé un plafond de feuilles rouges au dessus de leur têtes, engendrant une obscurité qui ne facilitait guère leur avancée. La mâchoire serrait, les membres contractaient, Lena scrutait le sol à la recherche d’une endroit où elle pourrait poser le pied. Elle ne devait surtout pas toucher les racines mais elles étaient si nombreuses qu’elle manquait souvent de chuter. Des crampes lui assaillaient les jambes et elle pouvait observer les racines se rapprochaient davantage, l’encerclant de toute part. Peu à peu les arbres s’espacèrent et elle déboucha sur une prairie qui s’étendait à perte de vue. Le soleil avait brûlé l’herbe qui craquait sous les semelles telle de la paille sèche. Yulia se battait encore contre les racines jusqu’au moment où son pied fit une erreur. Les arbres se mirent alors à tripler de volume et la jeune femme faillit être étouffée entre deux baobabs. Elle courrait à présent et sectionnait les racines afin de les couper de leur source d’alimentation. L’idée sembla marcher et elle atteignit la prairie, le cœur battant. Elle se débarrassa précipitamment de sa veste couverte de sève, de peur que du poison y soit mêlé, avant de s’écrouler sur le sol.

- Tu vas bien ? demanda Lena en la prenant dans ses bras. J’ai cru un moment que tu resterais bloquée.
- J’y ai cru aussi…


Cette dernière l’embrassa et la jeune femme se surprit à aimer ce contact et même à y répondre. Elle se sentit rougir mais se retourna pour le cacher à sa partenaire. Alors qu’elles traversaient l’immense prairie. Un son intense retentit et la terre se mit à trembler. Tout fut vacarme et enfer. Le sol se déroba et se mit à tourner. En moins de deux minutes, elles s’écrasèrent sur quelque chose de moelleux et doux. Lena ouvrit fébrilement les yeux et fit une incroyable découverte : le sol se trouvait en dessous de leurs pieds et elles marchaient à présent sur des nuages aussi épais que mobiles. Ainsi, avaient-elles bien du mal à garder l’équilibre.

- C’est quoi ce monde de fou, s’exclama Yulia en se tenant la tête. Comment allons-nous rejoindre la zone deux si nous sommes bloquées ici ?
- Nous n’avons pas réfléchi ; la prairie aurait du nous étonner. C’était un piège. Je crois que ce petit tour de manège n’est destiné que pour nous deux. L’avantage est que d’ici nous pourrons plus facilement repérer la sortie.

Yulia hocha la tête et elles s’élancèrent à la recherche d’un moyen pour revenir sur la terre ferme.

Les jeunes femmes marchaient depuis un moment déjà, et les nuages ressemblaient de plus en plus à un désert aride. Lena observait les nuées qui s’en échappaient, dont la consistance était semblable à du coton ou encore au sucre filé de la barbe à papa. La blancheur de ce paysage lui faisait mal aux yeux et elle prenait soudain conscience que les nuages formaient des îles flottantes hérissées de pics, de montagnes où des vallons, des ravins creusaient leur surface neigeuse. La jolie rousse grelottait et avait bien du mal à se croire éveiller. Pour peu, elle aurait pu se penser dans l’une de ses aventures extraordinaires telles Alice au Pays des Merveilles, tant la logique ne répondait pas aux normes habituelles. Tout semblait vouloir tester leur capacité à se détacher du réel. Il fallait se méfier de tout et ne s’étonner de rien. Les premiers arbres apparurent alors, tout blanc, près desquels trottinaient des moutons d’une pâleur presque spectrale.
- C’est étrange ils sont tous blanc ! s’exclama Yulia en enjambant la clôture.

Mais à peine eut-elle fait deux pas que les moutons disparurent d’un coup. La jeune femme se stoppa et s’écria d’une voix aiguë :

- Des moutons invisibles ? Si j’avais su que je me battrai contre des forces surnaturelles, j’aurai refusé l’offre !
- Du calme, rétorqua Lena en la rejoignant. Je pense que si nous tondons leur laines peut-être arriverons-nous à confectionner des parachutes.
- Encore faudrait-il les voir…


Elle n’avait pas tort. Tout cela s’engageait mal mais elle ne voyait pas d’autre façon de descendre des nuages. Elles perdaient du temps précieux à vadrouiller ici et ces moutons pouvaient sûrement les aider.

- Le ciel se couvre, et la nuit tombe, constata-t-elle en frissonnant. Il vaudrait mieux camper ici ce soir.
- Je suis d’accord, installons-nous près de la clôture pour continuer de les observer. En plus, ils me donnent faim. Peut-être pourrions-nous en faire cuire un ?
- Je ne sais pas, hésita Lena en réprimant une grimace. Cela pourrait être un piège. La viande pourrait être empoisonnée… Il vaut mieux se contenter des fruits que Zentara m’a montrés, c’est plus prudent.
- Oui tu as certainement raison… dit-elle avec une pointe de regret. J’espère seulement que l’on en trouvera rapidement.


Elles s’éloignèrent et avec des branches d’arbres, firent du feu. Lena se précipita pour réchauffer ses mains engourdies et violacées auprès des douces flammes dont la couleur contrastait avec l’univers de blanc qui leur était présenté. La journée avait été longue, tellement longue qu’elle s’était surprise à souhaiter, à de nombreuses reprises, à s’enfuir sans se retourner. Pour peu elle serait bien restée sur ces nuages, éloignés de tous les tracas quotidiens. Vivre dans une petite maison de coton, élever des moutons des cieux et vivre avec cette jeune femme, lui semblait une perspective d’avenir tout à fait plaisante. Cela serait si doux…

- A quoi tu penses princesse ? lui demanda Yulia qui avait remarqué son air songeur.
- Je nous imaginais vivre ici.
- Il y aurait en effet un côté romantique, rit la jeune femme en la prenant par la taille.


Lena ne répondit pas. Il y avait quelque chose d’agréable dans le fait d’être assise auprès d’elle. De trop agréable… De plus en plus, elle songeait à son amie qui la laissait de moins en moins indifférente. Les baisers échangés avaient égayé en elle une passion éteinte, une envie interdite de faire trembler le monde. Pis, une étrange attache se créait et l’empêchait de penser sûrement. Elle n’avait jamais vraiment été attirée par les femmes alors pourquoi ressentait-elle des sensations si étranges ? Quels chemins remarquables ses traits prenaient-ils pour qu’elle ne se lasse de leur regard ? Sûrement son apparence masculine trompait-elle sa perception… Et pourtant elle désirait ce corps féminin plus qu’elle n’avait jamais désiré aucun autre. Elle s’allongea alors tout contre la jeune femme et se laissa envahir par cette chaleur corporelle si douce, si magnifique. Elle osa une main discrète autour de sa taille avant de poser sa tête près de la sienne, la bouche effleurant tendrement son cou. D’un coup, une pression délicate vint comprimer sa main qui, d’une justesse profonde, fut portée contre la poitrine de son amie. La jeune femme ne ressentit aucune joie, aucun émerveillement, seulement une vague d’amertume : toute cette mascarade n’était que pour le public.
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MessageSujet: Re: The Imaginary Games - HannahP22   The Imaginary Games - HannahP22 Icon_minitimeDim 9 Aoû 2015 - 12:40

Alors que la jeune femme allait sombrer dans le sommeil, Yulia la réveilla en lui chuchotant agréablement à l’oreille :
- Regardes les moutons, ils sont revenus !

Elle s’appuya sur son coude droit et observa en effet que les moutons étaient réapparus.

- Ils doivent redevenir visibles lorsqu’ils dorment, hasarda la jeune femme en baillant. En tout cas, ne perdons pas une minute, essayons d’en tondre un ou deux.

Sur ces mots, Lena se mit à la tâche. Armée de son couteau, elle se rapprocha d’un mouton et s’appliqua à couper la grosse laine grasse, les mains tremblantes de peur de faire un mauvais mouvement. Au bout de trois moutons elle en avait assez pour se confectionner un large parachute. Alors qu’elle rangeait ses morceaux de laine dans son sac, un cri de douleur se fit entendre. Yulia se tenait l’abdomen où du sang en sortait abondamment. Les moutons s’étaient réveillés et se jetaient à présent vers les deux intruses qui se mirent à courir tant bien que mal sur la lande de neige. Lena soutenait Yulia, dont la pâleur affolante lui faisait presque perdre connaissance, les ralentissant considérablement. Malheureusement les moutons étaient bien trop nombreux pour espérer les semer. Plus la course s’accélérait, plus il lui semblait qu’elles se rapprochaient du vide. Ses craintes furent confirmées lorsqu’elles ne purent plus faire un pas de plus.
- Si nous ne sautons pas, ils vont nous tuer ! s’écria Lena dont le regard féroce des bêtes la faisait trembler de peur.
- Et si nous sautons, nous finirons en charpie, rétorqua son amie d’une voix plaintive.

Le dilemme fut vite régler lorsqu’une femme recouverte d’une peau de loup arriva et terrorisa d’une force phénoménale le troupeau de moutons.
- Venez, leur intima l’inconnue d’un signe de main.

Elle les menèrent à une petite cabane en coton où elles purent s’installer à leur aise. Lena allongea au sol son amie qui s’était évanouie. L’inconnue se dévêtit de son  « costume » et la jeune femme reconnue l’australienne. Sa tête était couverte de petites tresses serrées et elle portait un arc en bandoulière à la manière d’une guerrière nordique. Elle alluma un feu et s’assit à côté de la blessée.
- Mon nom est Ava, dit-elle d’un ton dur. Comme vous, j’étais dans la prairie quand l’incident est arrivé. Pour tout vous dire, je vous ai suivies ; j’ai été agréablement surprise par votre traversée entre les baobabs alors j’ai pensé que l’on pourrait s’entraider un moment. Surtout que je sais comment descendre de ces fichus nuages.

Elle s’arrêta le temps d’arracher un bout de nuage magique et l’appliqua sur la blessure de Yulia. Remarquant le visage pâle de la jolie rousse, elle déclara :
- Ne me regardes pas ainsi ; je sais bien que c’est une femme et cela ne me gêne pas. Je me fiche bien de toutes ces stratégies politiques. Au final, nous luttons tous contre la même chose. Mais ne t’inquiètes pas, là où nous sommes personne ne peut surprendre notre conversation.

Lena était trop abasourdie pour répondre et laissa son regard errer sur le ventre plat de son amie. Elle aurait tant souhaité le palper, l’embrasser doucement…
- Ah ah ! Quel drôle revirement de situation ! rit Ava en surprenant ses joues rouges de désir. Tu l’aimes ?
- J’aime les hommes. Je n’ai que faire d’elle, mentit la jeune femme qui sentait la colère montait en elle.
- Tant mieux parce qu’elle me plaît bien…

Lena était sur le point de la gifler lorsque Yulia ouvrit doucement les yeux, toussant gravement. L’australienne lui fit boire de l’eau avant de détacher le coton de sa plaie à présent fermée.
- Les nuages sont magiques, expliqua t-elle en souriant à la blessée. J’ai moi-même du en faire usage à cause d’une grave blessure à la jambe.

Yulia la remercia d’un câlin un peu trop appuyé au goût de la jeune femme. Elle sentait la jalousie lui brûlait l’estomac et la peine lui assaillir le cœur. Elle coupa court à cette étreinte en demandant froidement :
- Quel est ton plan pour descendre d’ici ?
- C’est simple. Tous les animaux ici sont magiques et possèdent une caractéristique précise. Par exemple, la laine que vous avez coupé vous permet à présent de vous rendre invisibles.
- Vraiment ? s’exclama la jeune femme aux cheveux de jais. Et bien cela nous facilitera grandement la tâche !
- La peau des animaux marche également, reprit Ava en se levant. C’est pourquoi j’ai tué un loup pour m’approprier sa force et des oiseaux pour être en mesure de voler… Mais attention si l’on porte trop longtemps ses « habits », ils finissent par se coller à votre peau puis par vous tuer. Je l’ai vu de mes propres yeux.
- Il faut courir le risque ; c’est notre seule chance.
- Je suis d’accord. Bon allez vous coucher, je vais prendre le premier tour de garde.

Ava sortit de la cabane en coton, laissant les deux jeunes femmes seules. La jolie rousse voulut s’allonger contre son amie mais elle s’écarta violemment.
- Tu n’es pas obligée de faire semblant ici, je sais bien que « tu n’as que faire de moi ».

Lena se tut, honteuse, le cœur déchiré.

*

Après un petit-déjeuner longuement apprécié composé de fruits qu’Ava avait cueillis plus tôt, les trois jeunes femmes enfilèrent leur peau d’oiseaux dont l’odeur de sang séché retournait l’estomac. Lena sentait son habit rentrer en elle désagréablement comme s’il fut à présent indissociable de sa chair. Elle avait une terrible envie de se gratter mais résista de peur de commettre une erreur qui lui provoquerait des ennuis inutiles. Toutes trois vêtues, Ava vérifia leurs tenues avant le grand saut, s’attardant particulièrement sur les courbes sensuels de la taille de la jeune moscovite. Lena eut quelques idées de la pousser dans le vide bien que son costume la protégeait entièrement de ce genre de fantasme. Comme une infime vengeance, elle attrapa la main de Yulia et murmura lentement :
- Quoiqu’il arrive, saches que t’aimer fut une surprise à la fois si étrange et si magnifique. Ne m’en veux pas d’avoir si peur de m’avouer qu’un amour plus long aurait pu se former dans d’autres circonstances moins déplaisantes.

La jeune femme aux cheveux de jais se contenta d’esquisser un vague sourire gêné et Ava n’aurait pu sembler plus ravie de son comportement.
- Coupons court, s’exclama cette dernière avec un engouement non-dissimulé. Il faut faire attention car ces « habits » sont vivants et consomment de l’énergie. Ainsi si le vôtre s’épuise totalement et que vous êtes encore dans les airs, vous vous écraserez au sol. Ne vous attardez pas ; ne vous laissez pas impressionner par les sensations.

Au bord du nuage, Lena serrait les dents à l’approche du vide. Elles finirent par sauter et pendant un instant la jolie rousse crut qu’il en était finit d’elle en sentant la terre se dérober sous ses pieds. Par bonheur ses ailes se déployèrent convenablement et elle se mit à voler comme un oiseau. Elle ne pesait plus rien, quel sentiment incroyable ! Elle brassait le ciel de ses ailes dans un tourbillon merveilleux en direction du sol lorsqu’elle vit les plumes de son « costume » se détacher, et les coutures lâcher. Il se défaisait et s’effilochait de toute part. Elle tomba à pique dans un marécage où elle sentit l’eau lui broyer les poumons. Elle essaya de remonter à la surface mais la vase la retenait prisonnière. L’eau était si sale qu’elle ne voyait rien ce qui ne faisait qu’accentuer sa panique. Alors que ses tempes bourdonnaient atrocement, elle sentit un bras l’entourait et l’extraire de la vase gluante. Allongée sur l’herbe, elle crachait de l’eau verdâtre qui lui piquait l’intérieure de la gorge.
- Je suis confuse, s’exclama Ava dont la voix vrombissait en un vague écho. J’ai du te donner le costume que j’avais grandement usé plus tôt.

Lena ne put s’empêcher de croire qu’elle avait délibérément tenté de se débarrasser d’elle mais était davantage préoccupée par les soins que lui prodiguait Yulia pour oser y songer autrement. Ses mains étaient douces sur sa peau et regretta leur contact une fois enlevées.
- Nous devrions nous remettre en marche, nous avons suffisamment perdu de temps, déclara l’australienne en aidant Lena à se relever. Surtout que nous sommes toujours coincées dans cette maudite forêt !

Les jeunes femmes s’enfoncèrent alors dans la jungle rouge dont les herbes s’élevaient facilement à plus de trois mètres de haut, empêchant toute progression rapide.
- J’espère que nous ne tournons pas en rond, soupira Yulia en regardant tout autour d’elle. Il est si dur d’utiliser une boussole alors que nous ne disposons d’aucun repère visuel !

Elles continuèrent d’avancer, sursautant instinctivement dès qu’un rugissement se faisait entendre. Le risque de se retrouver face à un fauve attiré par l’odeur de chair fraîche, était grand et cela effrayait la jeune femme. L’odeur d’humus lui piquait la gorge et elle avait du mal à respirer. Rien ne ressemblait à ce qu’elles connaissaient. Les buissons, les feuillages étaient drôlement difformes, les fruits évoquaient des visages grimaçants et les lianes d’horribles serpents. Elles arrivèrent alors sous le couvert de grands arbres qui ne ressemblaient cette fois-ci nullement à des baobabs. Les troncs étaient oranges et portaient des rayures noires, rappelant étrangement celles des tigres.
- Il faut faire attention, souffla Ava en se tournant vers les deux jeunes femmes. Tout comme tous les végétaux qui se trouvent ici, les feuilles de ces arbres sont carnivores. Je les ai vues dévorer à elles seules un oiseau entier ! Méfiez-vous également de tous les fruits. Ils dégagent tous des odeurs terriblement sucrées mais sont en réalité remplis de gaz qui manqueraient de vous arracher une partie du visage.
- Comment peux-tu connaître tant de choses de cette jungle alors que tu nous as suivies depuis le début ? remarqua la jolie rousse qui avait bien du mal à cacher sa méfiance à son égard.
- Comme je me tenais à l’écart de vous, j’ai eu tout le loisir de croiser et d’observer les erreurs d’autres candidats. Je dois avouer avoir ressenti du plaisir à voir quelques-uns périr par leur hardiesse hasardeuse.

Elle se tut et désigna un trou dans le sol dissimulé par un tapis de lianes tressées.
- C’est étrange, fit Yulia en s’accroupissant. Pourquoi un trou si grand ferait-il au beau milieu de la jungle ?
- Je ne sais pas mais peut-être pourrions-nous l’utiliser pour passer d’une zone à une autre ? proposa l’australienne en coupant de son sabre les lianes gênantes. Bien que nous ne savons pas ce que cachent ces sous-sols, cela sera sûrement plus sûr que cette forêt dont nous ne savons pas grand chose…

Après un instant de réflexion, elles se jetèrent une à une dans le trou et s’enfoncèrent dans les profondeurs de l’arène. Un paysage de tunnels se dessinait au fur et à mesure qu’elles avançaient grâce à la torche allumée, et une odeur de terre mouillée vint envahir les narines. Quinze minutes s’écoulèrent et un bruit strident résonna dans l’étrange souterrain : Ava n’était plus qu’un monstre hideux s’apprêtant à les dévorer entières.


Lena courrait depuis si longtemps que des crampes lui déchiraient à présent les ligaments des jambes. Avancer semblait lui être une torture, d’autant plus que le noir était total. Les chocs étaient violents, les chutes atroces et les pleurs nombreux. La jeune femme avait cessé de respirer et suivait les pas lourds de son amie dont les halètements se faisaient de plus en plus forts. « Ava » les talonnait de peu ; l’odeur fétide qui émanait de ses rugissements le prouvant indubitablement. Lena avait du mal à garder son calme et chercha aveuglément la main de Yulia qui l’attira alors à l’intérieur de ce qui semblait être une large entaille dans le mur. Leur corps se touchaient et Lena se sentit coupable de se trouver si grandement excitée dans un pareil moment. La bête ne sembla pas remarquer leur cachette et continua son chemin en continuant d’effectuer d’horribles grognements. Les deux jeunes femmes s’enfoncèrent dans la crevasse et débouchèrent dans une salle dont il leur fallut une dizaine de minutes pour en faire le tour complet.
- Je ne crois pas qu’Ava ira nous chercher ici, nous sommes sauves, souffla Yulia en se tenant la poitrine. Que s’est-il passé ?
- C’était une tromperie ! s’exclama t-elle les joues rouges de colère. On nous a envoyées une copie de la véritable Ava pour nous tester et on est tombé dans le panneau d’une facilité impressionnante. Ah quelle naïveté ! J’aurai bien du voir que l’australienne ne nous aurait jamais proposé ce genre pacte.
- Je suis désolée de ce qui nous est arrivé, je n’aurais jamais pensé qu’elle puisse être un piège.

Lena lui prit la main et tenta de la rassurer :

- Ne t’excuses pas ! Le véritable problème est de savoir comment l’on va sortir d’ici. Nous n’avons ni lumière et une bête rôde près de nous.
- Nous avons un briquet rappelles toi ! Peut-être pourrions-nous trouver une issue car à moins de revenir sur nos pas nous sommes bloquées ici !

Sur ces mots, la jeune femme sortit de son sac son briquet et l’alluma d’un geste prompt trahissant une crainte certaine. La petite flamme n’éclairait pas grandement si bien qu’elle créa une torche à l’aide d’un vieux bout de bois sec qu’elle avait ramené de leur voyage sur les nuages et d’un bout de laine enroulée. La pièce s’illumina et elles purent découvrir une salle parsemée de hiéroglyphes à l’image des grandes pyramides égyptiennes. Un tombeau trôné à leur gauche et pour peu elles auraient presque pu se croire plongées dans une aventure d’un roman pour jeunesse.
- Il ne manque plus que les serpents et nous serions parées pour quelques temples maudits, ironisa Yulia en admirant les magnifiques dessins sur les murs.
- Je me demande bien par quel tour de passe-passe, nous sortirons d’ici.
- Peut-être devrions-nous regarder dans le tombeau, suggéra Yulia après avoir posé sa main sur ce dernier.
- Si nous n’étions pas dans une pareille situation, je penserai que tu es folle ! soupira Lena en la rejoignant.

Le tombeau ouvert, elles y découvrirent un escalier en colimaçon qu’elles suivirent à la fois craintives et enthousiastes d’avoir enfin trouvé une sortie. Alors que les marches ne semblaient ne plus en finir, elles débouchèrent sur un vaste jardin qui s’apparentait plutôt à un immense potager géant.

- Je crois que nous venons de passer dans la zone deux, s’écria Lena les yeux pétillants de soulagement. En tout cas, on peut dire que la nature est le propre de ces jeux !

Brusquement une créature gigantesque sortit de derrière une carotte de la hauteur d’un building, étrangement habillée de feuilles de maïs tressées. Sa chair était aussi ridée qu’une vieille pomme de terre et ses bras n’étaient rien d’autres qu’une pelle et un sécateur aux lames colossales. Tel un jardinier, elle descendit sa pelle en direction des tomates géantes et les effleura à la recherche de celles qui étaient mûres.
- Elle va nous découper en rondelles si nous ne nous éloignons pas !
- Cela ne servirait pas à grand chose. Regardes ses narines ; elles sont en alertes. Elle a sûrement détecté notre odeur.
- Et si nous nous aspergions de jus de tomate ? hasarda Yulia en plantant son sabre dans l’une d’entre elles. Sûrement pourrions-nous passer inaperçues ?

Une fois couvertes du liquide rougeâtre et poisseux, elles se mirent en route. Lena avait bien du mal à supporter cette odeur de terre qui lui collait à la peau. Et dire que des millions de spectateurs la voyaient ainsi ! L’avantage c’est que personne ne pouvait apercevoir qu’elle rougissait de honte. Soudain Yulia se retourna vivement, gesticulant de tous les côtés :
- Mon Dieu c’est l’américain John Carter ! Il est en en train de devenir une carotte !

En effet, la peau du jeune homme était d’un orange nacré et des tiges vertes lui poussaient à la place des cheveux. Les jeunes femmes essayèrent de le délivrer des racines qui le retenaient prisonnier mais ce dernier ouvrit les yeux abruptement :
- Laissez-moi tranquille où j’appelle le jardinier ! Une carotte ne peut plus se laisser dorer paresseusement au soleil sans se faire déranger ? Comment pourrais-je donc devenir la plus belle des carottes si l’on ne me laisse pas me reposer ?

Elles s’éloignèrent rapidement, concluant qu’elles ne pouvaient plus rien faire pour le malheureux.
- Je commence à me demander si nous ne finirons pas de la même manière. Les pièges sont si vastes et si imprévisibles.

A ces mots, d’immenses flasques d’eau tombèrent du ciel et elles durent se mettre à courir afin d’éviter de se noyer.

- L’arrosage automatique ! hurla Yulia en zigzagant. Nous devons nous cacher !

Elles se ruèrent alors à travers un champ de citrouilles et elles en dépecèrent une précipitamment à l’aide de leurs mains. Comme la chair était molle elles n’eurent pas de mal à effectuer ce travail. Une fois terminées, les deux jeunes femmes se cachèrent à l’intérieur, grelottant de froid.
- Nous sommes toutes trempées et nous puons la citrouille. Je crois que nous n’avons jamais connu pire ! s’énerva Lena en se tenant les genoux.
- Vu la taille du jardin, l’eau risque de couler pendant un moment je pense. Au moins nous sommes à l’abri de tout... Nous pourrions en profiter pour parler sincèrement.

La jolie rousse leva les yeux vers elle bien qu’il n’eut trop peu de lumière pour qu’elle puisse la distinguer pleinement. Elle se pencha et l’embrassa tendrement. Il n’y avait pas grand chose d’autre à dire.

*

Elles passèrent la nuit dans la citrouille avant de reprendre leur longue marche. Malgré la situation, Lena était heureuse de la manière dont évoluait sa relation avec Yulia. La jeune femme ne semblait plus lui être si indifférente vu qu’elle avait passé la nuit dans ses bras. Elles n’avaient pas encore tout à fait parler de ce qu’elles étaient mais elle pouvait sentir qu’il n’en saurait tarder. Elles arrivèrent devant une route de pavés blancs, semblable à de la craie. Autour de cette route se dressaient des massifs de fleurs qui lâchaient un terrible gaz toxique et des cactus qui bombardaient les airs d’épines à chaque son suspect
.

- Comment allons-nous faire pour traverser ce chemin ? se plaignit Yulia en essayant d’observer l’horizon. La fin paraît si loin et les plantes n’ont pas l’air du tout amicales !
- La zone 3 doit sûrement se trouver de l’autre côté s’il y a tant de dangers à affronter, répondit la jeune femme en posant sa main sur son épaule.

Après un moment d’hésitation, elles poursuivirent leur chemin, rampant à moitié au sol pour éviter les attaques de cette végétation qui semblait se donner tant de mal pour exterminer tout intrus. Au fil des minutes, Lena avait l’impression qu’elles grandissaient démesurément et elle ne put s’empêcher de faire part de sa crainte à son amie.
- J’ai moi aussi cette désagréable sensation, fit Yulia en levant le nez vers les plantes qui mesuraient à présent plus de quinze mètres. Mais je crois plutôt que c’est nous qui sommes en train de rapetisser…  Nous ne voyons même plus l’horizon ! Si ça se trouve nous ne mesurons pas plus de cinq millimètres !

Lena devint blême et se figura assaillie de divers insectes gigantesques. Quelle mort triste et pathétique !

- Nous ne sommes pas les seules à être tombée dans le piège, reprit la jeune femme en désignant d’un coup de tête un homme au sol.

Alors qu’elle s’accroupissait pour vérifier s’il était mort, ce dernier commença à la frapper violemment au visage. Une bagarre éclata provoquant le terrible éveil des plantes qui se mirent à se déchaîner sur les trois candidats. Le gaz, les épines fusaient de toute part et Lena suffoquait. Sûrement saignait-elle.. Soudain les paysages se décomposèrent, le ciel se brisa, tout devint blanc.
*

La jeune femme se réveilla. Ses tempes bourdonnaient et sa tête arrivait à peine à relier quelques pensées. Zentara se trouvait à ses côtés le visage grisé de soucis. Lena aurait juré qu’il n’avait pas dormi depuis des jours et ses traits tirés ne faisaient que confirmer son hypothèse.

- Le pacte a été rompu, déclara-t-il le regard vide en la voyant se relever. Les jeux sont terminés.

- Où… Où est Yulia ? bredouilla la jeune femme en observant la chambre dans laquelle elle se trouvait.

- N’espères plus la revoir ; le monde est en guerre Lena. La Russie a pris le contrôle et les pays se sont alors divisés en deux blocs : Ceux qui sont pour la dictature de la Russie et ceux qui sont contre.

- Et nous nous sommes quoi ?

- Contre bien sur ! s’exclama t-il en se levant promptement. Bien que nous avons la même vision politique, les Russes ont toujours été trop extrémistes et utilisent la violence et la répression pour obtenir ce qu’ils veulent. Malheureusement, ils se sont emparés de la Maison Blanche et je crois bien qu’ils parviendront à leur fin. Il semble qu’ils aient planifié tout cela depuis un moment.

A présent Miroslaw Zentara s’agitait partout dans la chambre, levant les bras au ciel comme s’il attendait un signe qui ne viendrait jamais. Elle ne l’avait jamais vu aussi soucieux et apeuré.

- Et Yulia ? murmura faiblement Lena qui ne pouvait s’empêcher de penser à autre chose.
- Elle nous a bernés aussi. J’ai appris qu’elle avait l’intention de te tuer une fois la zone 3 traversée. Je suis vraiment désolé.

Lena sentit les larmes perlaient sur ses joues mais resta silencieuse. Après tout, cela prenait sens. Elles n’avaient jamais été rien d’autre que des étrangères.

- Les Russes sont devenus fous tu sais, reprit Zentara feignant de ne pas s’apercevoir de l’état de la jeune femme. Ils ont pour ambition d’envoyer tous les opposants, les personnes âgés et même les malades à la mort. Ils veulent créer une race pure digne de l’idéal communiste. Ils ont déjà envahi la Pologne, la Hongrie et même l’Allemagne ! Ils sont en train de créer un dôme pour tous nous y enfermer. C’est pourquoi je t’ai amenée en lieu sûr.
- Où sommes-nous exactement ?
- Chez l’une des mes connaissances à Amsterdam. Il nous héberge nous et d’autres candidats qui ne peuvent rentrer dans leur pays. S’ils parviennent à retrouver notre trace, ils nous tueront. Nous avions un pacte avec la Russie ; nous l’avons rompu en choisissant le camp adverse et…

- Qu’ai-je à voir dans tout cela ? le coupa-t-elle pressée d’en finir.
- Dois-je te rappeler que tu as été la représentante de la Pologne ? T’attraper serait pour eux tout aussi important que d’attraper le président ! Et puis il y a autre chose…
- Quoi donc ?
- Le gouvernement russe sait que tu aimes en réalité Yulia… en tant que femme je veux dire.
- Il pense que je suis homosexuelle ?
- Oui et à ses yeux c’est un crime qui mérite la peine ultime. Il s’en donnera à cœur joie de t’exécuter sur la place Rouge !

Lena se tut. Elle se sentait idiote d’avoir eu des sentiments pour une femme qui n’avait cessé de songer à la tuer. Elle avait pensé qu’elle aurait pu s’ouvrir à elle, qu’elle aurait pu l’aimer mais rien de tout cela ne se passerait. Elle l’avait abandonnée et jamais elle ne le lui pardonnerait.

- Nous avons peu de temps, fit Zentara qui s’était immobilisé devant un miroir.  Dans trois jours nous partons pour les Etats-Unis. Ava va s’occuper de toi en attendant… et cette fois la vraie !
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MessageSujet: Re: The Imaginary Games - HannahP22   The Imaginary Games - HannahP22 Icon_minitimeDim 9 Aoû 2015 - 12:42

Une jeune femme à la peau mate entra dans la chambre, le teint sombre et délicat, une trousse de soin à la main. Elle semblait plonger dans une vague mélancolie qui étrangement lui donnait l’air d’une enfant sans défense. Elle s’assit à ses côtés et lui posa une serviette mouillée sur le front. Lena plongea son regard dans celui de la jeune femme avant de lui demander d’une voix malade mais sure :

- Est-ce vrai ? Que le monde se meurt ?
- Je le crains, fit Ava en portant une main à sa nuque. Les gens sont arrêtés puis entassés dans des trains en direction de ce dôme immense qu’ils s’amusent à construire. Certains seraient même envoyés dans des camps où la mort serait immédiate. Mais nous n’avons pas encore pu les localiser si bien que des rumeurs viennent évoquer la possibilité de plates-formes volantes qui permettraient de jeter les cadavres dans le vide.
- C’est insensé ! s’écria Lena en se levant malgré les recommandations de Zentara.
- Voilà pourquoi ces événements sont bien réels, répondit l’australienne d’un sourire triste. Viens, je vais te faire visiter notre cachette. Elle n’est pas grande car nous sommes dans un grenier, mais très bien réalisée.

En effet, ce dernier se divisait en trois petites pièces aménagées de sorte que la lumière électrique ne puisse témoigner de leur présence vue de l’extérieur. Plusieurs matelas étaient posés un peu partout au sol où un poêle trônait dans la chambre principale. Ava lui expliqua qu’ils pourraient tourner de sorte que tout le monde puisse profiter de la maigre chaleur. Elle finit par une courte explication du fonctionnement de la cuisine mais Lena n’écoutait déjà plus. Elle songeait à tout ce qu’elle avait laissé derrière elle, à comment les choses avaient basculé dans une réalité proche de l’horrifique.

- Tout ceci est rudimentaire je le conçois, dit-elle après avoir terminé sa visite. Mais nous n’avons pas le choix. Bon il se fait tard, je pense que nous pouvons sortir à présent.
- Sortir ? s’étonna la jeune femme en sortant de sa torpeur. Je croyais que le but de toute cette mascarade était de ne pas nous faire voir.
- C’est le cas. Voilà pourquoi nous ne sortons que la nuit.
- Mais que faîtes-vous ?
- Des petites luttes sans importance contre l’ennemi. Ce soir nous irons faire exploser le bateau qui servira à emmener 1500 de nos congénères à la mort.
- Et tu appelles cela des « petites luttes sans importance » ? s’exclama la jeune femme abasourdie. C’est de la folie ! Et puis c’est inutile ils n’auront qu’à prendre un autre bateau.
- Non car c’est le seul bateau qu’il leur reste. Tous les autres sont déjà partis.

Lena la suivit sur le toit de l’immeuble, grimpant silencieusement les escaliers. Miroslaw Zentara était déjà là, habillé d’un long manteau noir. Il grimaça lorsque son regard se porta sur la jeune femme et jeta sa cigarette au sol.

- Retourne à l’intérieur Lena ! Il est évident que tu ne viens pas, je dois te garder sauve.

Après de vagues embrassades, ils s’en allèrent tandis que Lena regagna leur grenier. Elle se força à grignoter une miche de pain et se fit infuser une tasse de thé. Alors qu’elle sentait la fatigue l’emporter, elle crut distinguer une ombre près de son lit. Cette dernière se rapprocha et une jeune femme apparut un pistolet à la main.

- Prends tes affaires, on part.

***

La chambre si petite, si obscure, compressait, étouffait. Lena aurait souhaité s’enfuir, s’enterrait si loin sous terre que même des cris d’agonie n’auraient su retentir. Elle observait les traits de la jeune femme d’un dégoût si fort que ses yeux finissaient par exprimer du désir.

- Je ne partirais pas avec toi Yulia, finit-elle par déclarer en lui tournant le dos.

Les mots étaient sortis, fermes, avec une haine si tranchante que personne n’aurait pu soupçonner un jour qu’elle puisse avoir eu de quelconques sentiments.

- Tu n’as pas le choix, répondit la jeune femme en lui agrippant le bras.
- Descends-moi maintenant. Si je dois mourir autant que cela soit par celle qui m’a trahie.
- Je suis là pour t’aider Lena, pas pour te tuer.
- Je ne vois pas de différence.
- Tes amis sont en train de se faire arrêter ! s’écria-t-elle en jetant violemment une chaise au sol. Je voulais m’assurer de te mettre à l’abri avant qu’ils ne viennent ici ! Considères-tu vraiment cela comme un odieux comportement ?

Yulia regardait à présent d’un air pressé par la fenêtre, le visage anxieux et tremblant. Elle semblait véritablement avoir peur d’une menace inéluctable.

- Que me vaut l’honneur de ta protection ? ironisa Lena en détournant le regard. Tu semblais bien en avoir oublié l’importance lorsque tu as planifié de me tuer dans l’arène.
- Ne fais pas l’enfant, nous avons très peu de temps ! Je t’en supplie, suis-moi !
- Je n’ai pas besoin de ton aide. Et puis qui me dit que tu ne me racontes pas encore des mensonges ? Je ne vois aucune raison de te suivre.
- Tu vas mourir si tu restes ici !

Lena eut un rire sardonique, proche de l’effroyable et tout sembla se taire pour la laisser s’exprimer.

- Crois-tu un instant que j’en ai peur ? Après tout ce que nous avons vécu, mourir me semble un idéal bien plaisant. Ma vie si triste, si terrible au toucher est sur le point de s’achever et cela ne me procure que joie et désirs inconnus. Je ne suis pas effrayée par l’idée de cesser de vivre ; mon cœur n’a été qu’un amoncellement de débris et de bavardages humains que je ne puis continuer à entendre aujourd’hui. Songes-tu que ma mort est mon unique liberté, mon seul masque de vertu ? Je n’ai vécu que pour l’horreur du monde et maintenant qu’elle est atteinte je ne vois plus l’intérêt de croire ou bien d’écouter ces hideux martèlements. Pourquoi m’ennuyer de vivre alors que nous ne connaîtrons jamais un monstre plus ignoble que celui  que vous nous donnez désormais à contempler ?

Elle se tut, la gorge nouée et sèche d’avoir trop parlé. Yulia hocha la tête honteusement avant de déclarer :

- La police est en bas, descendons. Si tu ne veux pas vivre avec moi, peut-être accepteras-tu au moins de mourir à mes côtés.


***

Le corps allongé sur le sol glacial et dur, la tête cassée en de milliers de petits morceaux, la jeune femme ne semblait plus sentir le moindre de ses membres. Elle aurait juré un début de fièvre tant elle mourrait à la fois de froid et de chaleur. Remarquant son regard perdu et hagard, Yulia lui lança d’un rire grave :

- Croyais-tu sincèrement que malgré ton touchant discours, je te laisserai mourir inutilement ? Même s’il est vrai que t’assommer fut peut-être un peu trop radical…
- Où sommes-nous ? grogna Lena en se frottant l’arrière de la tête.
- Près des quais, lui répondit la jeune femme en scrutant derrière elle. Je voulais m’assurer qu’il ne restait pas quelques heureux survivants.
- En restent-ils ?
- Seulement trois et huit grièvement blessés mais qui à mon avis ne dépasseront pas la nuit. Ava en fait partie. J’ai appelé des renforts pour les emmener directement en soins intensifs.
- Ils sont à l’hôpital ? s’enquit la jeune femme en grimaçant.
- Bien-sûr que non. Je les ai envoyés dans la section C.
- La section C ? De quoi parles-tu ?
- De la Résistance voyons ! s’écria t-elle, le visage rouge d’excitation. Nous ne sommes pas qu’une poignée Lena. Nous avons fondé tout un réseau un peu partout dans le monde où trois catégories se distinguent : les Undergrounders, les Skylighters et les Kamikazes. Les premiers utilisent des sous-sols pour se déplacer à l’insu des autorités russes et provoquent des éboulements en plaçant des explosifs sur les fondations des sièges les plus importants et les deuxièmes vivent sur les toits et peuvent ainsi observer les moindres déplacements des Russes et leur résister par divers moyens.
- Ce n’est pas très intelligent, remarqua Lena d’une voix faible. Il suffirait de les bombarder pour tous les tuer.
- C’est là que tu te trompes. Les Russes ne peuvent pas raser tous les bâtiments surtout si ces derniers leur appartiennent. En s’installant sur les toits, ils deviennent intouchables contrairement aux Undergrounders. Il suffirait de gazer le sol et tous ceux qui seraient à l’intérieur crèveraient.
- Et les Kamikazes ?
- On les appelle ainsi car il est presque impossible de les tenir en vie très longtemps. Ce sont des résistants qui s’introduisent dans les planques ennemis et les affrontent au front. Nous donnons généralement ce travail aux jeunes recrues inexpérimentées mais on serait étonné de voir le nombre de volontaires en manque de carnage. Quand à nous, nous sommes des Skylighters, il faut être très habile et ne pas avoir peur de sauter de toits en toits.
- Pourquoi ce nom ?
- Parce que lorsque nous abattons un avion ennemi, le ciel s’illumine de notre victoire.
- C’est un si jolie nom pour une situation bien horrible…

Yulia haussa les épaules. Elle ne semblait pas s’en soucier autrement comme si la guerre n’était pour elle qu’un jeu de rôles inutile. Son retour avait provoqué un grand trouble chez la jeune femme si bien qu’elle ne parvenait à la regarder sans se demander si elle n’était pas encore l’objet d’une vilaine comédie.

- Pourquoi n’es-tu pas plutôt en train de me tuer ? Pourquoi avoir choisi la Résistance ?
- Si tu cessais de me percevoir comme une haute criminelle tu comprendrais peut-être, déclara-t-elle d’un ton sec. Maintenant suis-moi, je vais te conduire à Ava.

Sur ce, Lena se tut et espéra revoir la jeune femme vivante.

***

L’hôpital se situant chez les Undergrounders, elles empruntèrent les égouts sales et purulents d’Amsterdam. A présent, la jeune femme affrontait vaillamment les eaux d’un gris-vert nauséabond, l’eau lui chatouillant désagréablement les chevilles. Elle avait si froid qu’elle ne doutait pas de l’arrivée d’une hypothermie dès le lendemain. Yulia, quant à elle, marchait à quelques mètres, l’échine recourbée, le visage pâle, presque honteux de n’avoir rien d’autre exprimer. Elle n’osait à peine remuer les lèvres, couvrant seulement le silence de murmures inaudibles, de souffles irréguliers. Lasse de ce silence qui lui pesait sur l’estomac, Lena multipliait en vain les stratégies pour le faire taire. Au bout d’une quinzaine de minutes, Yulia tourna une vanne collée au mur cuivré et rouillé des égouts et un chemin sinueux se dessina devant elles.

- A partir de cet instant plus un bruit, souffla la jeune femme aux cheveux de jais. Une fois plongées dans ce tunnel, il faudra se faire discrètes car il est construit juste sous une bouche de métro désaffectée que certains Russes corrompus utilisent comme lieu de transaction illégales de tout type. Ainsi ceux qui ont les poches remplies d’or ont la possibilité de racheter leur liberté afin d’éviter d’être emporté par le prochain convoi.
- Et ils finissent tous par crever, souillant nos rues de leur liberté pourrissante, railla Lena d’un rire grave.
- Il vaut mieux mourir en homme libre que de se faire massacrer dans ces immondes abattoirs où on te dépèce comme un animal, où on te vide lentement de toute identité.

Elle avait parlé avec tant de dureté que la jeune femme ne put s’empêcher de se mordre la lèvre inférieure avec force, regrettant de son intervention.

- J’ai du mal à croire en de tels lieux… fit-elle après un moment de silence.
- Tu demanderas à ton cher ami Zentara si je mens, si le monde ment ! s’exclama t-elle avec une vigueur non-dissimulée. Je souhaite simplement te protéger mais si ton cœur ne jure que par le scepticisme, va vérifier par toi-même. Monte dans l’un de ces trains où l’on transporte le bétail, et ose en revenir pour me contredire. Cela me fait tant de peine que tu doutes de ce que je suis. Crois-moi lorsque je dis que je n’ai jamais voulu te tuer dans l’arène tout comme je n’ai jamais souhaité être la représentante de la Russie. Je le suis devenue que par un enchaînement d’évènements désastreux. Et crois-moi encore lorsque je te demande de me suivre pour te sauver la vie !

Lena baissa le regard promptement comme si elle venait de se brûler les lèvres de mots interdits. Elle s’approcha alors doucement de la jeune femme et lui caressa la joue d’une main tendre et amoureuse.

- Toi et moi nous venons d’un même passé atroce au souvenir, je l’ai toujours su, et j’aurai tant aimé que tu me le livres un jour. J’ai une confiance éternelle en toi Yulia et parfois je me hais pour ma témérité mauvaise et sûrement naïve. Tu connais mes sentiments – Dieu sait comme je n’ai jamais aimé – et je suis effrayée de ressentir ce que je condamnais d’un rire moqueur des années durant. Vois-tu j’ai perdu mon identité et je tremble à l’idée d’apercevoir mon reflet bouger par lui-même. J’ai tant de douleur que mon cœur balance entre haine sans nom et amour pénétrant. J’en viens même à me comparer à ces héroïnes tragiques des grandes tragédies classiques ! Ecoute ma langueur et admire ma transformation sanglante ! Ne suis-je guère à plaindre ? Je devais m’écrouler seule sur scène d’un désespoir maladif et voilà que l’on m’apprend que je vais mourir dans ce théâtre d’infortune où ces millions d’acteurs se font tuer massivement lors d’une unique représentation tragique. L’ironie n’est-elle pas saisissante ?
- Ta fin n’a pas forcément l’obligation de se terminer dans le sang, répliqua la jeune femme en la prenant dans ses bras. Si tu as tant confiance en moi, crois-moi de nouveau si je t’avoue ici même mes sentiments. Quel terrible ardeur pour un monde en guerre ! Je ne la laisserai pas atteindre ton joli cœur ; j’ai confiance en la Résistance et je te promets de nous dessiner un avenir qui ne sera ni feu ni débris.
Les deux jeunes femmes s’embrassèrent lentement, tendrement… la pression si délicate, si belle que l’on n’en oublierait presque le cadre « chaleureux » des égouts d’Amsterdam.

***

Hannah P. s’humidifia les lèvres et scruta avec vigueur le visage de l’inconnue qui semblait se contracter à chacun de ses silences. Pourquoi l’avait-elle abordée déjà ? Qu’importe ? Il ne fallait jamais trop s’étonner.

- Voilà, dit la jeune femme en esquissant un profond sourire.
- Voilà quoi ?
- Voilà comment j’ai clôturé mon histoire.
- Pardonnez-moi, s’exclama t-elle la jeune inconnue, mais cela ne ressemble en rien à une fin.
- Je n’ai jamais dit que c’était une fin. Il n’y a rien de plus beau que de laisser son lecteur sur sa faim. Et puis tout ceci n’était qu’un défi. Voyez-vous je me range davantage du côté des réalistes. Ecrire sur une arène fantastique ? Quel immonde idée ! Je ne suis en rien Suzanne Collins ! Ma vie, je la dévoue à la souffrance, à l’inégalité sociale et non au profit commercial. Je savais qu’en continuant l’écriture de ce récit, l’horreur du monde deviendrait de plus en plus forte et que je ne pourrais empêcher la mort de revenir, comme toujours, caresser le bout de mes doigts. Ainsi il valait mieux cesser les mots avant qu’ils ne prennent le dessus. Vous comprenez ? Après tout, terminer sur un jeu d’amour est aisé et une porte de sortie acceptable.
L’inconnue eut un hochement de tête incertain avant de laisser échapper un sourire détestable.

- Soyez sans crainte, votre histoire ne vous aurait jamais permis d’acheter un roman de Suzanne Collins.
- Vous êtes si cruelle.
- Et vous si imbue de votre personne.
- Comment pourrais-je l’être alors que je ne suis personne ?
- Pourtant vous parlez de vos travaux comme si c’était de l’art.
- Je ne suis personne mais j’exerce l’art -  Peut-être même l’exercez-vous aussi ? - Toutefois cela ne veut pas dire qu’il me permet de vivre. Bien-sûr je suis critique vis à vis de mon travail car c’est tout ce que je peux prétendre offrir. Je ne suis personne mais j’aime savoir que j’existe. Vous avez raison, sûrement est-ce un peu égocentrique de ma part.
- Je peux vous affirmer que vous existez, dit-elle en haussant les sourcils. Je vois, je vous entends même si je ne vous comprends pas.
- Un jour mes propos vous apparaîtront si véridiques que vous vous souviendrez de mon nom. Alors à cet instant je n’existerai plus. Je vivrai. Je vivrai d’une telle rage que le bonheur n’en sera même plus important. Je vivrai juste. Je serai quelqu’un.

Il s’ensuivit un temps mort.

- Alors vous ne finirez jamais cette histoire ? s’enquit la jeune femme dont la voix s’était radoucie.
-  Les histoires ne sont pas faites pour être finies mais pour être vécues. Or celle-ci je l’ai vécu pleinement. Elle est usée. Banale. Triste. En général, je n’aime guère les fins. Elles raillent le récit, le perd et le détruit. Je préfère de loin laisser l’imagination de chacun créer ce dont il a besoin. Moi je ne finis pas, je créé. Quelle drôle définition de l’art, vous ne trouvez pas ?

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